UNE ANNÉE DE LA VIE D’UNE FEMME, Semaine 4, la nuit de l’ivrogne.

La nuit de l’ivrogne

Mon mari changea de chemise et mit son pantalon du dimanche, par contre il ne voulut pas entendre parlé d’une toilette quelconque. Il alla dans la cour remonta un seau du puits et se débarbouilla le visage et les mains. Fier de lui il revint en me disant propre comme un sou neuf, allons y.

Effectivement il avait les mains propres mais sentait quand même le bouc. La sueur et la crasse chassaient les maladies j’en étais bien consciente, mais certains hommes au village prenaient soin d’eux et apparemment ne tombaient pas plus malade.

L’église d’Avrillé était dédiée à Saint Pierre, j’aimais ce lieu et je vénérais la statue de notre mère avec son enfant à l’intérieur. Le vieux clocher s’était écroulé il y a bien longtemps, sous Napoléon le premier, croyait se souvenir le père.

Pour ne pas arriver en retard, il nous fallut presque courir, Stanislas faillit perdre un sabot et gueula comme un charretier tout du long du parcours.

J’aimais les messes, le cérémonial, les chants, pour moi c’était une fête, une distraction , un décorum. Lorsque le curé ouvrait son grand vespéral de cuir et qu’il entonnait les chants toute mon âme vibrait. Je me sentais en communion avec le seigneur, rien ne pouvait m’arriver.

Je me hâtais bien vite de rentrer à la Gaborinière, Stanislas avait rejoint mon père à l’auberge puis tous deux avaient fait une virée dans les caves environnantes.

Ce jour là des coups à l’amitié, ils en burent quelques uns. De nombreux paysans avaient quelques ceps et nous même nous en avions aussi. Alors les hommes qui se réunissaient pour les gros travaux se retrouvaient aussi dans leur chai, pour comparer, pour discuter. Cela commençait par le temps et les conséquences sur les travaux agricoles, puis après plusieurs verres immanquablement venaient les propos égrillards puis paillards.

Le soir, le père et Stanislas revinrent dans un état lamentable. Papa qui ne tenait plus debout s’était étalé de tout son long dans une ornière. Il était trempé, gueulait à tue-tête des chansons cochonnes. Il fut incapable de se déshabiller et de toutes façons Marguerite n’en voulait pas dans sa couche.

Après une lutte mémorable mes frères l’allongèrent dans la grange où il cuva jusqu’au lendemain.

Mon mari avait mieux tenu la barrique, mais d’amoureux il se fit entreprenant. La nuit tombait vite en cette saison et l’on se couchait de bonne heure. Mon ivrogne s’était couché et roucoulait des bêtises. J’entendais ma petite sœur qui pouffait de rire. Moi autant vous dire que j’ai traîné me trouvant toujours quelques choses à terminer. Il était hors de question que ce triste poivrot mette ses sales pattes sur moi.

Je finis par l’entendre ronfler, alors dans le noir j’ai enfin pu retirer ma coiffe, puis les épingles qui retenaient mes cheveux. Ils étaient ma fierté, longs tombant en cascade sur mes reins, cela faisait des années que je ne les avais point coupée. Je quittais ensuite ma robe me retrouvant en chemise, il faisait froid et je m’interrogeais à savoir si j’allais retirer mes gros bas de laine.J’étais prête et soufflait enfin la chandelle. Lorsque Stanislas s’endormait avant moi ce moment était le mien, dans le silence reposant je rêvais enfin. Je me glissais dans un autre moi, dans un autre lieu. Puis doucement dans ce monde merveilleux je plongeais dans le sommeil. Une extase, ce lieu où moi seule je pénétrais, un secret, un paradis. La grosse main de stanislas se glissa soudain entre mes cuisses. Il rigola de sa ruse d’ivrogne, ayant feint l’endormissement pour que je me couche.

Il troubla mon envol vers un monde meilleur, je décidais dans un premier temps de lui résister un peu. Mais malgré tout je connaissais mon devoir de femme mariée. Le curé nous le rabâchait sans cesse, nous nous devions à nos hommes.

Devoir de femme, mais aussi de chrétienne, tout était clair au regard des hommes comme de la loi. Nous étions possessions de notre père, puis ensuite de notre mari, pour le meilleur comme pour le pire. Je ne sais pas si se faire prendre par son mari saoul comme un polonais faisait parti du pire. Moi en tous cas clairement le bonhomme il me dégouttait fortement. Passablement énervé il voulut plus que d’habitude, me prenait-il pour une catin. Si je connaissais bien mes devoirs de femme je connaissais aussi les limites que l’église mettait à toutes sortes de pratique. Nous en discutions entre nous de toutes les cochonneries que les hommes aimeraient qu’on leur fasse. Je suis bien sûr que certaines ne résistaient guère aux demandes de leurs hommes mais les bonnes chrétiennes dont je me targuais d’être ne se commettaient point en de pareils entreprises.

Ce diable de soûlard n’obtint que le minimum me fit son affaire en un rien de temps. Le gros repus se retourna, me lâcha un sale pet et se mit enfin à véritablement ronfler. Je pus enfin retourner à mes rêvasseries, mais le charme n’opéra plus, la nuit fut mauvaise et la petite pleura pour avoir le sein

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