Une première naissance
Le 31 août 1711, le hameau de la Roulière est en émoi, la Fleurissonne va accoucher.
Le moulin est à l’arrêt comme en attente de l’événement. Alors qu’elle nourrit ses poules Marie a perdu les eaux. C’est un peu la panique, la matrone habite au bourg et les belles sœurs sont on ne sait où au diable.
Marie se demande si elle ne va pas lâcher son petit en la seule présence de la petite bonne. Pierre tourne en rond comme un chien en chaîne. C’est une chose qu’il ne peut maîtriser et ne pas maîtriser il n’aime pas cela alors il hurle et tempête comme si le garçon meunier y pouvait quelque chose.
Enfin la matrone arrive elle est aussi appelée femme qui aide, mère mitaine, bonne mère, ventrière ou bien sage femme. Elle est de préférence une femme âgée, disponible, ayant eut une nombreuse progéniture.
Elle doit être agréée par le curé car elle peut administrer les serments du baptême en cas de danger de mort de l’enfant.
Elle doit être aussi agréée par la communauté paysanne.
Présente à tous les stades de la vie, elle pratique souvent la toilette des morts.
Aucune connaissance particulière n’est exigée, elle a simplement la réputation d’avoir réussi quelques accouchements sans problème.
La vieille fait calfeutrer les entrées afin qu’aucun esprit mauvais ne pénètre, nous sommes en aout mais elle exige un feu la chaleur est torride, Marie transpire sous ses vêtements qu’elle a gardé. Ce n’est pas parce qu’on accouche que l’on doit montrer sa nudité.
Le cierge de la chandeleur est allumé est une parente a amené la ceinture de la vierge.
La parturiente est assise dans son lit bien calée par des oreillers, l’accoucheuse en habituée ouvre les cuisses de Marie. Cette dernière sursaute à cette intrusion intime mais sait qu’elle doit se laisser faire si elle ne veut pas accoucher seule comme une louve des bois. De ses doigts goures aux ongles sales de paysanne qui revient du champs, elle fouaille l’intimité de la meunière. Son avis vaut certitude, cela ne sera pas long le chemin est fait et l’enfant bien placé.
La peur envahit toutefois Marie, saura t’elle faire, ne souffrira t ‘elle pas trop, un vent de panique la parcours. La vieille a pris son ouvrage et s’assoie à la tête du lit, attendre et encore attendre, les contractions se rapprochent, la douleur est intense. La matrone à la chandelle repart inspecter l’avancement des travaux. L’enfant est presque là, la chevelure noir du bébé se confond avec la toison de sa mère, pousse et pousse encore, il est là, ou plutôt elle est là car Marie donne naissance à une fille, la ventrière coupe le cordon à raz, si cela avait été un garçon elle aurait coupé à la longueur du sexe.
Puis elle allonge les tétons du bébé afin qu’elle devienne une bonne nourricière. La drôlesse est enfin lavée avec un mélange de beurre et d’eau chaude et d’eau de vie, puis on la frictionne avec du vinaigre et du vin. Elle est enfin emmaillotée et peut rester ainsi dans sa merde un bon moment.
Pierre mécontent délaisse ce futur embêtement, paye avec un poulet et un lapin, la peine de la sage femme et s’en retourne à son labeur.
Marie exsangue pleure de n’avoir pas donné un garçon à son mari, elle se promet de faire mieux la prochaine fois. Maintenant il faut accomplir le rituel du baptême se dépêcher car en ces temps la mort rode sur les petites âmes, elle se prénommera Marie comme sa mère, le parrain est Nicolas Chaigneau marchand et la marraine Gabrielle Brebion la femme de Jacques Allard.
Ce fut assez cocasse de persuader le grand père Jean de prendre la femme d’un charbonnier pour marraine, il tenait cette catégorie de travailleurs pour des bandits de grand chemin.
Marie qui ne peut se rendre au baptême pour cause de relevailles se dit que la religion est un peu bizarre. Tout d’abord l’on encense la vierge Marie, une femme qui a conçu un enfant sans faire commerce amoureux et ensuite on déclare impure les femmes qui en ont fait un avec leur époux. Quarante jours sans messe, sans trop sortir de ce moulin qui maintenant l’obsède et bien sûr sans que son mari ne lui susurre des cochonneries aux oreilles.
D’ailleurs le gaillard tiendra t’ il ce pari fou de ne pas toucher sa femme pendant cette longue période, considèrera t’il à l’instar des dogmes chrétien que sa Marie est impure?
LES FARINIERS DE LA ROULIERE, PARTIE 1/16, LES ORIGINES
LES FARINIERS DE LA ROULIERE, PARTIE 2/16, L’ANCÊTRE
LES FARINIERS DE LA ROULIERE, PARTIE 3/16, LES NOTABLES
LES FARINIERS DE LA ROULIERE, PARTIE 4/16 , LA NUIT DE NOCES
LES FARINIERS DE LA ROULIERE, PARTIE 5/16 , RÊVERIES DE MEUNIER