Vendée canton de la Mothe Achard
1794
Une noire fumée s’élevait au dessus de la métairie, aucun bruit ne s’élevait hormis le crépitement des flammes qui montaient dévorant le toit de chaume.
Ce trouble silence n’annonçait rien de bon à la petite troupe dépenaillée qui s’avançait précautionneusement parmi les fourrés qui fermaient presque hermétiquement la petite exploitation.
Rien n’indiquait une présence, aucun hurlement de chien avertissant son maître, aucune oie ne cacardant pour protéger son capitole, même les étourneaux avaient fait choix de se taire.
Les hommes doucement se rapprochaient en rampant pour s’assurer qu’il n’y avait aucun piège .
Un homme les rejoignit, il s’appelait Jacques Cloutour.
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Ils sont loin, près du moulin je crois qu’ils vont bivouaquer.
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C’est bon on y va
André Peaud qui occasionnellement dirigeait la petite troupe s’avancait, son arme prête au tir. Les autres le suivaient la peur au ventre de ce qu’ils allaient trouver.
Prés du puits gîsait le chien égorgé, des mouches déjà s’affairant sur ses plaies béantes.
Puis soudain l’indicible, la métayère allongée sur le fumier les bras en croix semblait dormir. Sa robe relevée sur sa poitrine nous révèlait ses jambes blanches. Son sexe triangle noir, en d’autres circonstances jolie toison de soie noire s’offrait indécent à nos regards.
Entre ses lèvres béantes un manche de pioche, la fière Louise empalée, souillée, violée, jetée au fumier semblait encore dominer son monde. Mais ce n’était qu’impression les soudards de la république lui avaient volé sa vie.
Plus loin son mari Jean le corps lardé de coups de baïonnette avait été jeté dans le brasier de la grange.
Au feu le rude fermier avait pris une posture bizarre semblant vouloir se relever en un ultime effort pour défendre sa famille. La peau de son visage était cloquée, le reste noirâtre comme bûches dans l’âtre. Pierre Letard se détourna et vomit.
Penchée sur le petit muret de pierres sèches, la petite Marie était nue les jambes écartées, offerte au regard, son léger duvet de petite fille point. Ses virginals orifices avaient été forcés, sang, semence, excrément souillaient les frêles cuisses de cet enfant sacrifié. Au cou un collier bleu, traces ultimes laissées par les mains de son bourreau .
Pierre Barreau n’en pouvait plus il s’assit et dans ses grosses mains il enfouit son visage. Comme un enfant il craqua et de grosses larmes coulèrent dans le sillon de ses rides.
Le long de l’étable, Jeanne l’aînée était aussi complètement nue, son visage figé dans un effroi nous regardait. Dans ses yeux on lisait l’épouvante, sa bouche tordue semblait encore hurler de terreur.
La pointe de ses seins avait été coupée, mutilant à jamais sa fierté. Au niveau du ventre un léger nuage de vapeur planait, une odeur nauséeuse inondait l’atmosphère, du pubis au mamelon Jeanne était ouverte. Ses intestins encore fumant étaient déroulés comme une vipère lovée dans un tas de bois.
Entre ses cuisses, sanguinolent un petit être, bleu, couvert de sang encore relié par son frêle cordon à sa maman. Trop tôt sorti par des mains impures il était là blotti, mort avant même d’avoir vécu
Pour la troupe à André cette éventration était le point de non retour, il fallait que les patauds payent ce massacre et que jamais ils ne s’en retournent chez eux pour y couler des jours heureux avec les souvenirs de leurs ignominies.
Les blancs se concertèrent, il fallait tendre une embuscade à ce groupe de bleus avant qu’ils ne rejoignent le gros de leur force.
Jacques qui les avait localisés, mena les hommes vengeurs.
Sans faire de bruit ce groupe d’hommes hétéroclites de paysans de divers paroisses approcha du campement improvisé des bleus.
Les massacreurs étaient repus d’alcool, de sexe et de mort ils se gardaient à peine et autour d’un feu entonnaient le chant de guerre de l’armée du Rhin en vidant force chopine. Leurs armes étaient rangées en faisceaux.
André Peaud divisera ses hommes, Jacques Caillaud, Jacques Ferré,Jean Tessier et le Pierre Guerin contourneront le moulin et attaqueront lorsque Jacques Cloutour, Pierre Letard, Pierre Barreau et lui même ouvriront le feu.
Vêtus de vêtements crasseux, sabots usés aux pieds, vestes en peau de mouton, armés de pétoires antiques ils étaient prêts à tout pour leur Roi, leur terre et leur Dieu.
Les soldats en sabots s’élancèrent faisant jaillir leur feu vengeur, les républicains n’eurent pas le temps de voir venir et s’écroulèrent, personne ne rechargea les fusils, les salopards expièrent leurs fautes à l’arme blanche. Pierre Barreau implacable ouvrit le ventre d’un jeune soldat bleu à peine sorti de l’enfance.
Pierre Guerin dans une haine inextinguible trancha la gorge de l’officier ignominieux. Bientôt tous furent morts. Jacques Caillaud se proposa de leur couper le sexe et de le leur faire bouffer, Jean Tessier voulut les oreilles pour s’en faire un chapelet. La haine amènait la haine, André les fit taire et s’agenouilla pour prier, bientôt rejoint par les autres.
Mais il ne fallait pas traîner, les armes des bleus furent ramassées et leurs vivres emmenés. Pierre Letard soudain s’exclama, il venait de trouver un coffre qui semblait être celui d’un collecteur de fonds.
Tous se penchèrent et s’apprêtent à ouvrir la boite à trésor quand un chant venu de nul part fendit l’air pur des vallons.
Nom de dieu, la Marseillaise sauvons nous, au loin une troupe nombreuse serpentait et se dirigeait vers le moulin. Les hommes fuirent par un chemin creux, le coffre était lourd il fallut l’abandonner, un peu à l’écart quelques rochers, sommairement l’on cacha la boite cerclée de fer et l’on se sauva parmi le bocage.
La troupe bleue sera ivre de rage et fera tout pour se venger.
Nos soldats de circonstance s’égailleront et retourneront chacun en leur village, se dispersement étant le plus sur moyen de réchapper à l’ennemi.
en lisant ce texte , j’ai une pensée pour mes anc^tres qui ont combattus ces bleus et dont certain ont payé de leurs vies; assassiné plus tard par ces troupes ayant mis à sac le Mans et ses environs mais que d’autres ont été remercié après par le nouveau roi qui les gratifia d’une médaille et d’une pension pour service rendu .
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