LE ROMAN DES MORTS, Épisode 12, les demoiselles du chateau

Les doutes de Gustave Tirant

Gustave Tirant est serein, il lit et relit son carnet de mobilisation, il n’est pas partant. Sa classe est épargnée. Il faut dire qu’avec ses quarante deux ans de vie il ferait un bien piètre combattant.

Cela fait bien longtemps que sa vie militaire est derrière lui, d’ailleurs la conscription ne l’avait pas envoyé bien loin. Il avait passé trois ans au 6ème régiment d’infanterie de Rochefort. Il n’avait combattu que les moustiques et une vilaine chtouille attrapée dans la rue des mousses. L’exotisme de Rochefort par rapport au Gué D’Alleré était tout de même là. Odeur de la mer qui remonte le long du fleuve Charente, mâts des bateaux qui bruissent au vent, matelots avinés qui dans les bouges parlent de contrées lointaines. Il s’y était finalement plu, mais n’y serait pas resté pour autant, le rappel à la terre étant le plus fort.

Après en avoir discuté avec sa femme il se rend à la mairie car finalement il n’est pas trop sûr, monsieur Gougaud saura bien lui dire si il doit ou non partir.

A la maison commune Gustave apprend qu’il y a une réunion du conseil, cet idiot qui en fait parti a oublié. Le voilà bien avec son papier, il s’assoit avec les autres.

L’ ordre du jour c’est les réformés de la commune, l’adjoint au maire Fernand Charron prend la parole. Gustave n’écoute guère il est préoccupé. Puis soudain il entend le mot idiot, il croit que c’est pour lui. Pas du tout et maintenant la salle du conseil résonne de bons vrais rires. Il y a dans la commune quatre réformés pour idiotie, les conseillers les connaissent , mais il est bon de le rappeler. Il y a cet andouille de Benjamin Giraudeau le fils au Théophile et à la Zélie, puis Volcy le gamin au Léon et à Athénais. Il y a aussi Fradin Constant , lui aussi bien incapable de faire un soldat.

On rigole un bon coup cela ne fait pas de mal dans la morosité ambiante.

Le maire après avoir consulté ses conseillers décide que pour l’instant il n’ y a pas lieu d’avoir recours à de la main d’œuvre étrangère au village. L’essentiel des battages ont déjà été faits avec les batteuses mécaniques et les grains sont rentrés. Il reste simplement quelques gerbes à battre de façon ancestrale, mais ils pensent que ceux qui ne partent pas pourront aisément y pourvoir.

Gustave qui justement ne veux pas passer pour un idiot se tait, oh comme d’habitude, car il n’est là que pour faire le quorum.

Il finit par montrer sa feuille à Amédé Barreau, celui l’examine et lui dit que pour l’instant il ne part pas. Il sort de la mairie rasséréné et va dire la bonne nouvelle à Loetitia.

Les demoiselles du château

Dans la grande demeure bourgeoise que certains paysans désignent en se moquant sous le vocable de château, les deux sœurs Lucie et Denise se chamaillent pour un bout de laine . Elles ont viré vieille fille depuis un bon moment bien qu’avec encore un peu de bonne volonté elles soient encore mariables. Les hommes du village qui sont tous à,leurs yeux que des vils culs terreux ne peuvent certes pas faire l’affaire. Bien que plus d’un au café de Berthet se vantent de les avoir couchées dans le foin, elles sont probablement aussi vierges que le curé. Lucie souffre des ricanements lors des fêtes villageoises alors que Denise, elle s’en moque totalement. D’ailleurs depuis quelques semaines cette dernière est toute chamboulée. Un jeune garçon lui a conté fleurette, bien gentiment et bien sagement. Elle en avait été émoustillée et avait accepté un rendez vous. Le garçon n’était qu’un gamin mais il était entreprenant, pour un peu au deuxième rendez vous il enlevait la place.

Depuis elle se sent transformée, mieux dans son corps. Lorsqu’elle est agenouillée sur son prie dieu pour la prière du soir elle se rougit à elle même en pensant à la main qui a remonté sa robe dévoilant à la vue sa culotte blanche savamment fendue et dernier rempart à sa citadelle interdite. Elle en était restée pantois devant tant d’audace et aurait bien aimé découvrir à son tour le symbole sacré de son amoureux du jour.

Malheureusement et comme c’est dommage la venue d’un groupe de noceurs les avait interrompus et avait cassé l’instant présent. Elle le sait le diablotin l’aurait prise et cela lui aurait donné un avantage incontestable sur sa sœur.

En attendant qu’elle le revoit, le souvenir de sa silhouette et de la douceur de sa main lui donnait des envies pas très sacrées.

Ces nuits sont peuplées d’hommes qui la prennent, elle se réveille en ébullition, trempée de sueur, haletante et à moitié dévêtue.

L’élu de son cœur et de son corps est à l’armée, elle vient de lui écrire mais son inquiétude va grandissante devant les dangers qui se précisent.

LE ROMAN DES MORTS, Épisode 11, la lettre et le départ d’Alexandre

LE ROMAN DES MORTS, Épisode 10, Benjamin au dépôt d’artillerie de La Rochelle

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