LES LETTRES A NINI, le plateau de la fille morte, épisode 7

Ma petite Lucie

Ces quelques lignes pour te dire que tu as affaire maintenant au caporal Trameau, je ne sais vraiment pas si le lieutenant m’a nommé pour m’emmerder ou pour me récompenser.

Mais à quoi bon de réfléchir à cela je suis nommé et dois faire face à mes nouvelles responsabilités

Nous avons subi une attaque d’importance, je dois dire que certains copains sont vraiment des bons, des enragés, oui c’est cela des foutus enragés. Moi je fais simplement mon devoir mais mon devoir principal est de vous revenir.

Tu me manques ma douce, ton corps, tes seins lourds et la tendre moiteur de tes reins.

J’en meurs de ton absence.

Heureusement que j’ai tes lettres que je relis sans cesse, certains ont une bible, un chapelet, une bague, moi j’ai donc tes tendres missives.

Je te laisse encore une fois, mon corps transpire de toi, embrasse nos petits

ton Daniel pour la vie

Du plateau de la fille morte les allemands nous dominent et nous canardent avec tous les calibres, obus , torpilles, mines.

Le temps est long je suis devenu un as de la manille, moi qui n’aimais guère cela au cabaret de Chailly.

Comme sur l’ensemble du front les coups de mains se succèdent, cela occupe la troupe, on finit par s’habituer, les poux , les puces, les rats, les corneilles, l’odeur des charognes, la merde, le fumier des animaux, la boue, l’eau, le froid, le râle des copains qui agonisent entre les lignes, l’absence des familles, la mauvaise bouffe ,oui on s’habitue. Mais la seule chose qui moi m’exaspère c’est les cons et là je vais vous dire que l’arrivée d’un jeune blanc bec sans poil au cul tout droit venu de Saint Cyr troubla la sereine tranquillité de notre mouroir.

Ordres injustes, corvées, tours de garde, inspections, nom de dieu on se serait crus à l’école de peloton.

Moi j’ai un peu renâclé, oh rien de méchant, une simple répugnance et un ralentissement significatif du travail en cours. Eh bien figurez vous que ce jeune sardiné il m’a collé un rapport.

Le capitaine m’a dit qu’il était bien étayé et que mon cas demandait sanction, me voilà embarqué sur un navire ou je me serais bien passé de monter.

A l’arrière et au gnouf, me voilà bien engagé, on me prête un défenseur et je passe devant une sorte de tribunal , ils furent indulgents, remarquez je n’avais rien fait. Je perdis simplement mon petit rien de grade et on me fit comprendre que j’aurais pu être fusillé, sut été dommage un si bon élément.

Je me retrouvais deuxième pompe mais le fait majeur c’est que ma sanction entrait un changement de corps. Je paniquais à l’idée de me retrouver dans un groupe spécial une nouvelle fois.

Le lendemain sous un soleil radieux j’appris que l’on m’affectait au 140ème régiment territorial. J’en ai laissé tombé ma musette et pour un peu j’aurais embrassé le lieut.

Putain de cadeau, fini les premières lignes je prenais mon bardas et le 28 mai 1916, je rejoignais ma nouvelle unité. Le glorieux 4ème partait sur Verdun où paraît il se passait quelques combats.

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