LES RELEVAILLES D’AUTREFOIS


Marie Bouriou n’avait pas eu le droit de se rendre au baptême de son fils, la tradition était bien ancrée c’était son 4ème enfant et jamais elle n’aurait imaginer transgresser cet interdit.

Notre bonne mère Marie n’avait elle pas été interdite de temple ( Jérusalem ) jusqu’au 40ème jour.

A vrai dire elle ne se posait pas la question, la coutume le voulait alors elle s y  plierait

Mais pourquoi les mères n’assistaient elles pas au baptême de leurs enfants ?

La réponse est à chercher dans l’antiquité Hébraïque et plus particulièrement dans le lévitique, en cette douce époque la femme qui venait d’accoucher ou d’avoir ses menstruations était entachée d’impureté . Cette dernière qui n’avait pas la signification de souillure empêchait toutes les femmes de se rendre sur un lieu de culte, de ne participer à aucune cérémonie et même de se rendre au lavoir.

Cette impureté liée au sang était même étendue au rapport sexuel, formellement interdit pendent les règles et après un accouchement.

La vierge Marie qui était juive ne fit donc pas exception. Ainsi donc la mère du Christ fut entachée d’impureté, un comble pour une vierge.

La religion chrétienne reprit à son compte cette idée d’impureté en rajouta un peu.

La femme qui paradoxalement faisait un don à la vie était impure pendant 40 jours dans le cas d’un garçon et de 80 jours pour une fille . Elle ne devait en théorie pas sortir de chez elle.

On le voit cette histoire mêle l’impureté du sang placentaire, le sang des menstrues et le tabou de la sexualité féminine.

L’homme n’était évidement entaché d’aucune impureté, c’est Eve et non Adam le responsable.

La date de la présentation de Jésus correspond à la chandeleur. Cette fois ci les chrétiens reprennent à leur compte un mythe païen de la fertilité . Encore un mélange, car la chandeleur arrive 40 jours après Noël. Fertilité, impureté, présentation à dieu, on s’arrange de tout.

Marie Bouriou cette impure n’avait donc pu se rendre à l’église, elle s’y rendra dans quelques jours pour une cérémonie que l’on appelle les relevailles.

Les canons de l’église précisaient 40 jours et 80 jours, parce que le fœtus conçu dans l’impureté, est réputé être resté sans forme pendant 40 jours pour les garçons et 80 pour les filles.

Évidemment chacun c’est vite rendu compte qu’une paysanne et mère de famille ne pouvait rester autant de temps sans sortir de chez elle. Actrice économique essentielle, un accommodement fut trouvé et de 40 jours on passa à un certain temps. Les femmes de la noblesse et de la bourgeoisie, moins bousculées par le travail respectèrent un peu plus les prescriptions de l’église.

Marie prépara sa réintroduction dans le cercle des fidèles de Dieu après une semaine. Ce délai lui avait d’ailleurs été nécessaire pour se remettre de ses couches.

Le jour des relevailles, Marie est accompagnée de la sage femme, de la marraine et de quelques voisines.

La matrone porte l’enfant sur son bras droit et la mère se tient du coté de la tête de son enfant, la marraine est de l’autre coté.

Dans cet ordre ce cortège exclusivement féminin arrive après 30 minutes de marche à l’église Saint Hilaire de Bazoches, le bébé connaît le chemin, car c’est le même qu’au baptême.

Marie s’agenouille à l’entrée de l’église, le prêtre lui amène un cierge ( celui de la chandeleur ). Elle le tiendra pendant la cérémonie. Le prêtre Javelot revêtu de son surplis récite une première prière puis pose un bout de son étole blanche sur le bras de Marie la relève et l’accompagne jusqu’à l’autel. Le prêtre continue son office, nouvelle prière, bénédiction et communion.

Marie a fini sa corvée, elle est de nouveau pure et va pouvoir réintégrer la communauté chrétienne et sa propre communauté paysanne.

Bien sur avant de rentrer chez elle pour servir un repas à ses proches, elle doit donner rétribution au curé. Une piécette et une partie du gâteau qui avait été béni pour la circonstance est donné en contre partie de la consumation du cierge ( en cire d’abeille, donc cher ).

On ne badinait pas avec cette cérémonie, car si la femme venait à mourir en couche , des relevailles post mortem avaient lieu. La sage femme ( encore elle ) prenait la place de la morte et se rendait à l’église avec le même cérémonial. Nos ancêtres étaient superstitieux et le non respect de cette coutume portait malheur.

Marie en sortant de chez elle pour la cérémonie a croisé son voisin, elle sut donc que son prochain enfant serait un garçon.

Les prédictions ne sont pas toujours bonnes, Marie Bouriou n’eut pas d’autre enfant et s’éteignit 6 ans plus tard à l’age peu respectable de 51 ans.

2 réflexions au sujet de « LES RELEVAILLES D’AUTREFOIS »

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  2. en 1960, ma mère l’a fait aussi pour la naissance de son 4° enfant, sa dernière. pour les 3 autres je ne sais pas. mais sa dernière grossesse avait été difficile, elle avait failli y rester et ma sœur est née prématurément, elle aussi était en difficultés. c’est peut être pour s’attirer la protection du Ciel qu’elle a fait ses relevailles. le vieux curé en était tout ému, il n’en avait pas fait souvent, et la coutume était en désuétude depuis belle lurette, il avait presque oublié le cérémonial …

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