3 février 1940
Françoise organise des groupes de scoutisme, » petites ailes, louveteaux » les enfants sont ravis et les plus grands veulent faire une équipe d’éclaireurs. Mais elle se fait une entorse en skiant, c’est un accident du travail en somme.
Les lettres de Raymond arrivent en quatre jours assez régulièrement, c’est une performance pour un pays en guerre dont les hommes sont mobilisés.
Le froid en la capitale est très dense, le gel et le verglas gênent les parisiens qui redoublent d’ingéniosité en entourant leurs chaussures avec des chiffons.
7 février 1940
Aujourd’hui c’est le repas pour la promotion du chef d’escadron Delmas, le menu est :
gratin maison,
lotte à l’armoricaine
haricots verts sautés
poulets rôtis
salades d’endives
fromage
savarin
macédoine de fruits
pêche melba
le tout arrosé de Traminer, de rosé en carafe , du Beaune 1929, de champagne et de liqueurs.
On voit qu’il n’y a visiblement aucun souci d’approvisionnement et qu’on trouve de la lotte dans les Vosges en pleine guerre.
Au front il y a la grippe, Raymond est las des nombreuses visites qu’il doit effectuer. Aux Marmousets les éclaireurs organisent des batailles de boules de neige, un clan est finlandais l’autre Russe. Visiblement dans l’esprit de chacun c’est la seule guerre qui a lieu, celle des Anglais et des Français contre les Allemands n’intéresse visiblement pas.
16 février 1940
Enfin une permission, Françoise annonce qu’elle ira rejoindre Raymond à Paris pour dix jours, elle annonce aussi ses fiançailles officiels.
Pour fêter tout cela elle dîne avec les canadiennes, des officiers de la Royal Air Force et des pilotes Polonais, décidément Megève est déjà une destination à la monde. Mais les peuples savent-ils que les officiers qui sont chargés de faire la guerre à l’Allemagne améliorent leur technique de ski plus qu’ils n’améliorent leur science du pilotage.
Les deux fiancés se retrouvent à Paris où ils passent 4 jours absolument divins, libérés dans leur esprit par ces fiançailles officieuses ils sont aussi libres dans leur corps.
Ces moments volés à la guerre et à la séparation est le paroxysme de leur amour. C’est une fusion, ils ne font qu’un, est-ce la peur de la mort, la longue attente d’une liaison officielle, la présence d’un femme légitime qui les empêchait de vivre pleinement cette union de leurs sens.
Ils descendent ensuite à Megève, Françoise lui fait visiter les Marmousets et lui présente ses collègues ensuite ils montent à l’auberge » chez ma tante » pour 5 jours de vie de rêves. Descentes à skis, farniente, discussions, nuits d’amour, siestes coquines et danses » au mauvais pas ».
Raymond peut repartir au front, il a vu sa mère , il a eut des nouvelles de sa fille Charlette et bien sûr la compagnie de sa nouvelle et presque officielle femme. Cette dernière arbore maintenant fièrement l’insigne du régiment de son homme .
9 mars1940
Françoise est très occupée, secrétariat, scoutisme, organisations de loisirs, cours de physique et de sciences, anglais et rangement bibliothèque.
Cela l’aide à oublier Raymond, un soir les enfant lui offrent un magnifique gâteau aux marrons pour la saint Françoise, elle en est émue aux larmes.
Dans sa chambre joliment dissimulées, elle trouve encore d’autres gâteries.
14 mars 1940
Les fédérations scouts lancent un appel pour récupérer le papier usager et les métaux ferreux. Aux marmousets les enfants courent les ruisseaux et les rues de Megève où ils en trouvent une grande quantité.
Il est un peu effrayant de penser que l’économie de guerre française à besoin de la ferraille collectée par les enfants de France, alors qu’une formidable menace pèse sur notre intégrité territoriale.
Mon Dieu que c’est long sans les êtres qu’on aime .
» la pluie, la grise pluie transperçante et molle tombe inlassablement sur la neige qui pourrit, sur l’herbe qui se détrempe, sur la terre qui coule en filets jaunâtres et les épaules des sapins disparaissent dans les brumes et les nuages si bas qu’on se croirait dans un pays de collines et non plus de montagnes »
18 mars 1940
C’est la stupéfaction Françoise vient d’apprendre que Raymond est à Paris, l’armée l’envoie faire un stage de Neurochirurgie chez Thierry de Martel à l’hôpital américain de Neuilly.
Excitée par ce retour elle plaquerait bien ses obligations pour voler dans les bras de son homme.
Mais elle donne un préavis raisonnable à Mme Thuiliers et termine les tâches en cours.
Le soir de cette annonce Françoise rêve merveilleusement et c’est toute brûlante de désir qu’elle va passer ses derniers instants aux Marmousets.
Dans sa dernière diatribe elle enjoint Raymond de demander à la femme de ménage de bien faire les poussières avant qu’elle ne rentre. On voit que le matérialisme côtoie l’amour et que même le désir le plus brûlant peut-être teinté de petites manies peu sensuelles.
20 – 22 mars 1940
Le gouvernement Daladier désavoué par la chambre remet sa démission, un nouveau est formé avec à sa tête Paul Reynaud.
Le nouveau venu n’a qu’une voix de majorité c’est bien peu, l’adhésion est bien mince, outre la tête du gouvernement il prend les affaires étrangères, Daladier reste au gouvernement avec rien moins que le ministère de la défense.
D’ailleurs les deux fils de ce dernier sont aux Marmousets et suivent avec intérêt le destin de leur papa. L’on voit donc que la pension des » Marmousets » n’est pas une colonie pour enfants des banlieues.