8 novembre 1939
Elle est enfin arrivée à Paris après un voyage épuisant, elle s’écroule chez sa tante à bout de force.
Par relation elle obtient un rendez vous chez un ponte, le docteur Ballerin.
A Munich un attentat contre une brasserie sanctuaire du début du Nazisme a été perpétué, on soupçonne une machination de Hitler pour éliminer quelques opposants.
13 novembre 1939
Françoise évite une opération, le moins que l’on puisse dire c’est que le travail a été mal fait dans cette maudite clinique de Toulouse.
Encore une alerte qui tire les habitants de Paris de leur lit, tante Gaby et Françoise qui ont pris le temps de se vêtir passent une heure dans l’abri de l’immeuble.
Encore une alerte pour rien , Paris n’est toujours pas bombardé. D’ailleurs les abris sont moins remplis et l’on voit moins de gens avec le masque à gaz en bandoulière.
Trois colis viennent de partir pour Raymond, contenant un stéthoscope, une anatomie de poche et des formulaires des médecins du nord. Les médecins militaires Français sont-ils dépourvus de matériel?
Mais elle pense aussi à son bien être, chaussettes kaki, lainages, livres et provisions.
25 novembre 1939
Françoise descend avec tante Gaby à Courbanton en Sologne.
Nous sommes en guerre mais il n’y a aucune restriction de circulation des trains, ni d’ailleurs des personnes, si ce n’était l’absence des hommes on ne verrait aucune différence avec la vie d’avant.
Le château de Courbanton appartient à des amis de la famille de Françoise, c’est un havre de paix au milieu de la Sologne.
Le village dont dépend cette splendeur du 17ème siècle se nomme Montreuil en Sologne. Françoise préfère certes la vie trépidante de Paris mais encore affaiblie par ses problèmes d’oreilles, elle y sera bien pour se reposer et réfléchir à sa vie future avec Raymond.
» J’ajouterais aussi que je donnerais cher pour que tu puisses venir me rejoindre par quelques magiques sortilèges, au milieu de cette hivernale Sologne, froide et belle, au milieu de cette somptueuse maison chaude et tout bariolée de rires de jeunes filles. »
Les soldats au front où sur la ligne Maginot en baveraient de désir, le château d’Émile Dubonnet est » une sorte d’oisellerie de luxe » où une ribambelle de jeunes femmes parées comme des » Marie claire » batifolent en un tourbillon charmant.
Ces jeunes filles désemparées, en veste à la mode, aux boucles dorées et aux ongles faits tricotent en se racontant des histoires de filles. Un phonographe déverse des heures durant des merveilleux disques de Jazz.
Il y a Micheline, Viviane, Marie Geneviève, Marie Thérèse, Claude et trônant en majesté Mireille la fille d’Émile Fabre l’ancien administrateur de la comédie Française.
Françoise a du mal a sympathiser au milieu de cette ruche d’abeilles qui se croient toutes reines.
Dans la grande pièce du fond les propriétaires des lieux monsieur Émile Dubonnet et sa femme discutent tranquillement avec tante Gaby et avec monsieur et madame Fabre, des volutes de fumée s’élèvent au dessus de leurs têtes et de leurs conversations, jetant de temps à autre un regard réprobateur envers la jeunesse bruyante.
Monsieur le propriétaire est l’héritier de l’empire Dubonnet » du bo du bon Dubonnet » ce Vermouth aromatisé au quinquina. Mais ce personnage attachant et hospitalier qui transforme sa demeure en foyer de jeunes échevelées qui cavalent d’une chambre à l’autre n’est pas qu’un homme d’affaire avisé c’est aussi un authentique pionnier de l’aviation, deuxième homme à traverser Paris en avion en 1910 et recordman du monde du vol en ballon. C’est une personnalité reconnue en France et en outre officier de la légion d’honneur
En ce moment il discute avec Émile Fabre, écrivain, metteur en scène de pièces de théâtre et administrateur général de la comédie française, Françoise aimerait l’entretenir, de littérature, de théâtre et aussi de son avenir.
Tante Gaby d’un port assuré fume avec classe et élégance comme si elle sortait d’un salon mondain. Ces plus que quinquagénaires discutent comme des adolescents et malgré la musique noire Américaine on entend leurs ricanements.
Françoise est comblée on lui a attribué une des plus belles chambres, elle donne sur la façade principale avec vue sur le plan d’eau, les cygne majestueux qui étendent leurs ailes semblent chaque matin lui souhaiter la bonne journée.
Bleue, avec un divan, rideau et dessus de fauteuil assortis avec goût,tapis feutré qui étouffe les pas .
Françoise dispose d’un bureau où elle pose sa machine à écrire, une commode à trois tiroirs, antique et majestueuse qui lui permet de disposer sa bien faible garde robe.
Mais comble du luxe Françoise a aussi un lavabo et un bidet avec eau courante.
Décidément loin de Dantzig et du mitraillage des stukas, elle prend son petit déjeuner au lit, fait sa gymnastique et ensuite va prendre un bain.
Ici tout est merveille et chacun et chacune peut se mouvoir et faire ce que bon lui semble, c’est la maison de repos idéal.
Mais malgré cet environnement Françoise se morfond de ne pas recevoir de lettres et en gourmande Raymond dans les siennes. Oublierait -elle que son amant n’est absent que parce qu’il est en guerre.
Le luxe de la maison , la domesticité, l’élégance des autres réfugiés, les prévenance des maîtres des lieux ainsi que la surveillance de tante Gaby feront-ils oublier que la botte Nazi, écrase nos alliés.
Enfin elle sait ce que lui rapportera ses articles à » jeunesse magasine », une demie page tous les quinze jours soit 65 franc par article. Cent trente francs par mois c’est une misère mais il faut bien débuter quelque part.
La tenue décrite par Raymond dans une de ses lettres la fait rire, mais devrait-on rire des bandes molletières et des culottes de cheval de nos officiers alors que nos adversaires disposent de tenues un peu moins début de siècle.
Françoise entre autres occupations joue au bridge, André Dubonnet le frère d’Émile, héros et pionnier comme le maître des lieux lui a servi d’adversaire.
Ce dernier qui a 42 ans n’a pas hésité à reprendre du service dans l’aviation, est a l’entraînement comme pilote de chasse dans les environs.
Il y a encore des hommes motivés prêts à se battre, mais cela durera -il si nos stratèges et nos hommes politiques ne se mettent pas à l’unisson pour attaquer l’ennemi.
Mais il est vrai que si la haine du boche est très forte, l’envie de ne pas se mêler d’une guerre entre Allemands et Polonais est encore plus forte.
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