LA MORT DU COLLABO DU GUÉ D’ALLERÉ, JUSTICE OU CRIME? Suite

Pourquoi, un homme suspecté de collaboration économique, un homme que l’on croit affilié à la Milice, un membre actif du parti populaire Française de Doriot que l’on dit même proche de François Sidos quitte-t-il la ville de La Rochelle encore occupée par les Allemands pour venir se réfugier dans un village aux mains des maquis?

A ce jour c’est pour moi une interrogation, un esprit éclairé pourra peut-être m’apporter une réponse.

La maison il est vrai entachée de mystère, était celle d’un juif réfugié expulsé de la zone

Entrons maintenant dans le vif du sujet, que l’on va voir fort controversé.

Je tiens à préciser que les informations et les faits que je vais narrer se trouvent dans les journaux de l’époque, enfin presque.

23 octobre 1944 dans le village du Gué d’Alleré évacué par ses habitants une Citroën traction s’arrête devant la maison où loge Breton.

Cinq hommes y pénètrent et procèdent à l’interpellation de notre collaborateur, une fouille de la maison permet de récupérer des preuves.

On traîne Breton dans la voiture pour l’emmener à la Rochelle pour qu’il y soit entendu par un tribunal militaire . Notons déjà l’incohérence du journaliste rédacteur, car La Rochelle ne sera libérée que le 7 mai 1945, aucun tribunal jugeant les collaborateurs ne s’y trouvait évidemment réunis avant sa libération.

Nous étions en une période fort troublée et les cinq maquisards n’auraient pas été mus par un sentiment de justice mais plutôt par un esprit de vengeance, voir ayant une pensée de lucre.

Une chose est sûre, Breton n’arriva jamais à une quelconque destination. Car on retrouva son corps le12 novembre à Marsais une petite commune du département qui soyez sûrs ne même nullement à La Rochelle.

L’affaire ressemble fort à une exécution et lorsque la situation devient un peu plus calme et que la vraie justice peut-être rendue, l’on recherche les responsables.

En l’affaire, les responsables sont le sous lieutenant Louis Carsique dit loulou et André Leblay, ainsi que le lieutenant Louis Malle. Les deux derniers occupants de la voiture ne seront pas identifiés.

Débute alors l’affaire Carsique et Leblay, le lieutenant Malle étant décédé d’un accident de voiture à Saint Georges du bois (17 ).

Le 21 février 1947 le capitaine Renault juge d’instruction au tribunal militaire de Bordeaux rend une ordonnance de non lieu pour les deux hommes.

La teneur de l’ordonnance selon la presse dit à peu près que  » attendu qu’il s’agit en l’espèce de la disparition du nommé Gaston Breton. Entendu que ce dernier signalé au service de la sécurité militaire comme collaborateur et très suspect en raison du fait que des signaux auxquels répondaient les Allemands, venaient de la propriété sise au Gué D’alleré. Que cette maison fit l’objet d’une perquisition ordonnée par le commandant Coustellier dit Soleil du 108 régiment d’infanterie.

Que cette opération aurait permis la découverte de lettres compromettantes confirmant les soupçons que l’on portait.

Carsique et Leblay sont libres, couverts par leur hiérarchie.

Mais poursuivons l’histoire avec leur version qui bien évidemment est la seule car Breton est mort.

Le Lieutenant Hugues (Malle ) chef de la sécurité militaire est donc chargé de l’arrestation de Breton. Après un interrogatoire dans la maison du Gué notre homme aurait reconnu appartenir à la milice, jusqu’à là tout est cohérent, notre homme n’est pas tout rose.

Ensuite on doit mener l’homme au pc du groupe qui se trouve à Épannes sur la route de Niort.

Il ressort que sur le chemin la voiture doit faire halte pour une panne ou bien pour un besoin pressant de Breton. Sur ce sujet les versions divergent chez les journalistes.

Profitant de cet arrêt Breton s’échappe, précisons tout de même que l’escorte est de cinq personnes, que Breton est âgé de soixante ans et qu’il est apparemment sous l’emprise de l’alcool.

Quoi qu’il en soit il s’échappe, on le poursuit sans succès et l’on tire de nombreux coup de feux sans apparemment toucher le fuyard.

L’affaire est donc très claire, d’autant qu’on avait pas de corps, et que Breton aurait été vu avec Sidos le chef de la Milice sur La Rochelle bien après son arrestation.

Bref il y a non lieu en 1947, nos maquisards sont blanchis et Breton ne serait même pas mort.

Bon l’affaire aurait pu être entendue si nous faisions fi du corps retrouvé à Marsay le 12 novembre 1944. Pour la défense des maquisards le corps n’aurait pu être identifié . Mais enfin il est fort probable que cela soit lui .

Pourquoi nos maquisards sont-ils passés par Marsay pour se rendre à Epannes, je vous le dis, connaissant la région ce n’est pas la route la plus courte et la plus directe.

Il n’est pas dit non plus comment Breton s’y serait prit pour faire tout ce chemin pour rentrer sur La Rochelle, vous voyez les interrogations sont multiples.

Quoi qu’il en soit la famille inhume Gaston Breton dans la concession familiale dans un des cimetières de La Rochelle.

En 1951 l’affaire est de nouveau ouverte mais cette fois loin des passions du moins le croit-on, par un juge d’instruction civil, le juge Durand.

Celui-ci considère que le corps retrouvé à Marsay est bien celui de Breton et qu’il a été abattu par son escorte.

Le Blay est interpellé à Aix en Provence le 5 juillet 1951 , quand à Louis Carsique il est déjà en prison à Bordeaux pour un délit de droit commun..

Le corps est exhumé mais aucun élément nouveau n’apparait. André Le Blay est incarcéré à la prison de Fontenay le comte.

Maintenant il est temps de conclure, le 12 octobre 1953 la chambre des mises en accusations de Poitiers dut rendre son verdict quand à la culpabilité de Carsique et Le Blay.

Loin des passions de l’époque nous pouvons constater que le dit Breton a été abattu sans jugement et que sa collaboration avec l’ennemi n’a donc pas pu être prouvée. Comme des milliers d’autres il a été sauvagement exécuté, mais certains opposeront ces actes de vengeance avec les atrocités commises par l’occupant et ses affidés Français.

Chacun jugera en sa conscience, doit on répondre au meurtre par le meurtre.

Quand à Carsique et Leblay ils sont bien sûr décédés emportant leur secret avec eux.

Disons que Gaston Breton fut reconnu victime civile et que l’on trouve sa fiche sur mémoire des hommes.

J’invite tous mes lecteurs qui auraient des renseignements sur cette affaire à me contacter, je pourrais ainsi compléter ou corriger mon texte.

Je n’ai à ce jour pas trouvé le résultat du verdict de la cour de Poitiers.

3 réflexions au sujet de « LA MORT DU COLLABO DU GUÉ D’ALLERÉ, JUSTICE OU CRIME? Suite »

  1. Superbe histoire comme d’habitude. Au sujet de cette affaire, j’ai entendu que se triste personnage avait fait déporté le précédent propriétaire de la maison qui était un de ces concurrent en affaire. Apparemment à se sujet ou à d’autres il y avait des tensions au Gué à la libération, c’est pour ça qu’avait était organisé le défilé de la libération. Si ça peut vous aider.

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  2. Suite à un mail que j’avais reçu il y a de nombreuses années sur la même affaire, j’avais tenté de faire des recherches mais j’ai du rapidement abandonner tellement tout était invérifiable. Dans mon souvenir, la voiture se serait arrêtée à Bouhet sur la route menant du Gué d’Alleré à Surgères, on aurait fait descendre le milicien et il aurait été liquidé dans un champ de Gilan. Je me rappelle aussi que le corps trouvé à Marsais (et non Marsay) aurait été attribué par facilité comme Gaston Breton, qui a ensuite été enterré comme tel dans un cimetière rochelais (la photo de sa tombe est disponible sur Généanet), mais que la rumeur publique disait que le cadavre inhumé avait toutes les chances de ne pas être le bon.
    Concernant le pedigree du commandant Soleil, voir sur mon site « Mille ans à Bouhet », la fiche « guerre 1939-1945 », p 12.

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