UNE ANNÉE DE LA VIE D’UNE FEMME, SEMAINE 37, la honteuse révélation

Je n’étais pas tranquille, les cancans dans mon dos et aussi une attitude étrange de la part de mon jeune frère. Il n’était plus le même, joyeux, enjoué, disert, la chanson au bord des lèvres alors qu’il nous avait habitué à de la réserve,  à de la pudeur . Je n’étais pas la seule à avoir vu un changement, mon père et mon frère le blaguaient en lui demandant si il avait trouvé une petite. Lui tête basse ne leur répondait pas et en cela j’avais beaucoup d’inquiétude.

Moi plus subtilement je l’entrepris sur le sujet, il se fâcha encore et encore, puis en soupirant m’avoua que bientôt quelques nouvelles viendraient bousculer notre quotidien.

Loin de me rassurer ce demi aveu me troublait et bizarrement je devinais la teneur du drame qui allait se jouer.

J’attendis donc de voir mais mon quotidien fut plus laborieux que d’habitude.

Non ce qui vint troubler la sérénité du moment ce fut qu’au lointain nous entendîmes le tocsin.

Cela faisait des années que nous ne l’avions pas entendu et tous furent inquiets, un événement politique ou l’annonce d’une catastrophe. Ce fut un incident qui ce jour là draina la population et vida les champs pour les diriger vers une grange de la métairie des Brosses qui brûlait. Malgré l’importance de la population en mouvement, personne ne fut en mesure d’arrêter le feu. Du point d’eau à la grange quelques centaines de mètres, mais l’on n’achemine point l’eau avec les mains et sans contenant ,la plus part des sauveteurs ne servit à rien. Le feu ne s’arrêtera que le lendemain par faute de paille et de bois à brûler. On soupçonna une trop forte décomposition due à une paille un peu humide mais comme d’habitude en ces moments de détresse on accusa quelques vagabonds, quelques ventres creux de passage. De fait on avait vu personne roder là bas, ce n’était que la nature. Dès le lendemain ce fut le métayer qui fut accusé par l’opinion publique de négligence.

De l’entraide à la médisance le chemin était court, le pauvre homme n’était pas plus négligent qu’un autre mais il joua de malchance. Son année de travail était perdue et il aurait bien du mal à joindre les deux bouts, tant le moindre problème venait perturber l’équilibre instable de notre économie. Un jour un homme arriva à la métairie, je ne le connaissais pas, j’étais seule avec les enfants et son air trop confiant me mit en état de méfiance. Il voulait parler au père, je lui dis qu’il devrait attendre le soir ou aller le rejoindre au champs. Il me dit qu’il avait son temps et qu’il attendrait là. Je n’étais pas tranquille, il ne faisait que m’observer, voir de m’épier. Il me troublait dans le mauvais sens du terme surtout lorsqu’il voulut me faire la conversation. Il lui donna un tour assez gênant, on eut dit bientôt qu’il me faisait la cour. Pas comme un paysan le ferait pour conquérir une femme, non plutôt comme un soldat tenterait d’enlever une galante. Même en notre profond bocage nous n’étions pas à l’abri d’une mésaventure. Des hommes de passage, des valets cherchant emploi, des soldats se rendant sur les lieux de leur garnison pouvaient être en manque de femme et vouloir se servir du cheptel féminin qu’ils croisaient sans demander l’accord à quiconque et principalement aux intéressées.

Je pense que la présence de ma fille et de ma petite sœur freina les instincts de prédateur du bonhomme. Le soir finalement les hommes rentrèrent, l’inconnu visiblement connaissait mon père.

Il ne voulut parler qu’à lui, je fus chargée de leur remplir leur verre puis Papa me chassa également.

J’entendis au bout d’un long instant un cri déchirant, c’était la voix de mon père. Il sortit en catastrophe en gueulant comme un cochon qu’on égorge. L’homme à sa suite s’éclipsa et l’on ne le revit point.

Sans connaître la teneur de la conversation je préssentais qu’elle recouvrait le contenu des ragots du marché de Poiroux.

Mais où était donc mon petit frère Augustin?

On le chercha un long moment mais la nuit tomba et personne ne le revit. Le père ne dormit pas à la maison. Antoine et Stanislas se demandaient ce qui se passait, ces deux idiots que seul leur nombril intéressait n’avait jamais rien remarqué ni rien ressenti. Par contre le valet plus fine mouche savait tout et savait surtout où Augustin se cachait.

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