1883 – 1886, la corberie, commune de Sainte Flaive des loups
Marie Anne Tessier , épouse de Charles Guerin
Notre borderie au village de la Corberie était bien petite et devait faire vivre trois ménages, imaginez la gageure. Vous aviez beau la cajoler, l’embrasser, même lui dire des mots d’amour, elle vous donnait ce qu’elle pouvait et dans notre cas cela était bien peu.
Mes fils travaillaient principalement avec leur père, mais se louaient pour les gros travaux dans des fermes plus grandes. Ils effectuaient ainsi un double travail assez pénible, lors des labours d’hiver, des moissons, des fenaisons ils passaient leur temps à courber l’échine et à suer sang et eaux afin de subvenir à l’existence de leur famille.
Mon bonhomme n’était plus aussi vert qu’autrefois, les cheveux gris devenaient rares, la barbe poivre et sel et les rides lui donnaient un air de vieux forban, souvent il se traînait et sa démarche penchée le faisait reconnaître entre mille. Ses fils prenaient à leur compte les plus durs travaux mais ce vieux têtu pensait qu’il pouvait encore en remontrer aux jeunes. Le soir quand il s’endormait dans sa soupe nous pensions qu’il était temps qu’il passe la main.
Nous les femmes nous avions bien entendu notre part, les bêtes, le potagers, la lessives, la cuisine, les enfants restaient bien sur à notre charge.
Mes brus comme leurs hommes se louaient également, chacun partait le matin et se retrouvait au hasard des tâches. La commune était vaste et les déplacement souvent longs, cela en rajoutait à la longueur du travail. Nous étions esclaves de la terre, esclaves de notre misère. Si seulement les terres nous avaient appartenu avec une possibilité d’extension en lieu et place de nos métayages ancestraux.
Les femmes au village disaient que la tendance allait plus vers le fermage et que dans certains endroits des paysans pouvaient acquérir les terres. J’avais un doute la dessus mais bon.
Pour ma part j’avais hérité de la garde de tous les enfants, évidement en plus de mon travail à la borderie. Pierre avait déjà deux filles et un fils, et André un garçon. Il m’en faisaient voir de toutes les couleurs, mais heureusement j’avais encore la main leste
J’avais souvent ma fille Marie avec moi, mais elle aussi devait se mettre sur le marché du travail.
Mes deux brus étaient deux sœurs et auraient du être complices et bien non elles se jalousaient l’une et l’autre, comparaient leurs vêtements, leur lit, leur mari respectif, le poids des enfants devenait même une source de dispute. Un jour il sembla à Louise que sa sœur Marie avait eu un regard déplacé envers son mari. Certes la Marie n’était pas une vierge effarouchée et savait jouer du croupion mais de là à aguicher son beau frère. Le problème était en fait que les deux couples dans notre maison surpeuplée étaient dans la même chambre. Marie impudique se promenait en chemise et pissait au pot devant tout le monde sans la moindre gêne. Il résultait qu’il n’y avait pas que son mari que se délectait de la vue de son culs.
Cela ne pouvait durer d’autant que mon Charles âgé de vingt ans savourait aussi le spectacle et que lui sans problème aurait goutté au fruit incestueux de sa belle sœur.
Je crois même qu’il lui aurait volontiers abandonné son pucelage, bon l’affaire fut réglée pour lui car il devait partir faire son service. Il fut envisagé qu’un couple déménage mais au niveau partage des meubles tous se déchiraient, dans l’attente d’un accord chacun resta sur ses positions et Marie ne remit en rien de l’ordre à ses habitudes. Figurez vous aussi que les deux prétentieuses faisaient des manières et exigeaient plus de robes, de jupons, de coiffes et de bonnets , elles avaient aussi des prétentions d’hygiène comme les catins des villes. Sûrement un conflit de génération, elles verraient bien avec leur fille.
L’aînée de mes petites filles allait à l’école , le matin elle partait avec sa gamelle, moi à son age je faisais la traite et je gardais les moutons. Ces messieurs des villes avaient décidé que pour le bien de tous, l’ensemble des français devait savoir lire et écrire. foutaise que cela, pour faire des drôles pas besoin d’écrits.
Ce fut aussi la période ou le Charles tira le mauvais numéro, bon il est vrai que tous les numéros n’étaient pas aussi mauvais les uns que les autres, selon votre tirage vous partiez cinq ans ou un an, ce n’était vraiment pas la même chose.
Le couillon de Charles partirait longtemps, cela lui ferait sans doute le plus grand bien et quand il rentrerait on le marierait ce qui je l’espère lui fera passer l’envie de regarder les cuisses des femmes de ses frères.
Il devait se présenter au 63ème régiment d’infanterie le 28 novembre 1882, il était un peu apeuré de nous quitter, de prendre le train et enfin de découvrir le monde autrement que par le prisme des voyageurs de commerce, des colporteurs ou des maquignons.
Lui qui ne connaissait pas sa taille sut qu’il faisait un mètre soixante et un, légèrement plus grand que ses frères, j’espère quand même qu’il apprendrait autre chose que ses mensurations. Apparemment chaque jeune en revenait transformé et aux yeux des mères pas souvent de la bonne façon, les garçons buvaient plus en rentrant et souvent s’étaient mis à fumer. Quand aux filles ils avaient tendance en rentrant à confondre les jeunes paysannes avec les putains des bordels ou avec les ouvrières des quartiers grandissants des villes.
Charles était sage, comment allait il revenir ?