1873 – 1876, le Beignon, commune de Saint Flaive
Pierre Cloutour époux de Victoire Epaud
Nom de dieu quel foin elle a mis la Victoire en se battant comme une chiffonnière avec mon amante, ma réputation pour sur elle en a prit un coup, les hommes du village comprenaient bien un peu mais n’étaient pas rassurés pour la vertu de leur épouse ou de leur fille, comme si je courais après toutes les femelles. Il n’empêche j’étais un peu dans l’embarras, ma servante ne voulait plus me servir et il a fallut que je déploie des trésors de mots doux pour qu’elle daigne me regarder à nouveau.
Mes deux femmes s’étaient bien crêpées le chignon, Victoire avait une touffe de cheveux en moins, la joue griffée, une lèvre fendue et un hématome sur la poitrine, Louise avait le cul tanné et la fierté bien entamée.
Je décidais d’être plus prudent et de moins voir mon amour interdit. Mon couple avec Victoire n’allait pas fort et il fallut que je me fâche, elle m’empêchait de voir ma maîtresse et se refusait à moi. Je vous garantis que cela n’a pas duré longtemps. Un soir comme tous les soirs elle se tourna , mal lui en a pris, j’ai exigé mon du. Une paire de gifles lui ont fait desserrer les cuisses, je suis le maître en mon foyer. C’est quand même curieux cette propension à ce que les femmes contestent l’autorité que nous a accordé l’église, le code civil et nos coutumes.
Puis j’ai changé de travail, il manquait des bras en cette période et nous pouvions facilement faire monter le prix de nos journées. Nous nous transportâmes au village du Beignon sur la commune de Sainte Flaive des Loups, quelques maisons , un moulin et la friche d’une vieille métairie.
Nous fumes rapidement bien en ce lieu, Victoire semblait ne vouloir plus faire d’histoire, j’aurai aimé lui faire un autre enfant, mais elle n’était pas très fertile et son ventre sec ne pouvait faire germer d’autres graines.
Je voyais toujours Louise, comment me passer de ce corps si avenant, de ses courbes dessinées par un génial dessinateur, comment aussi se passer de sa ferveur amoureuse. Vraiment le contraire de Victoire qui elle se refusait à toute initiatives et qui était bloquée par une moralité pseudo chrétienne.
Le seul inconvénient était que je m’étais éloigné et qu’il me fallait faire montre d’intelligence afin de trouver des prétextes d’absence.
Victoire mon épouse était en mode surveillance, elle m’épiait, me questionnait sans arrêt, j’avais même l’impression qu’elle me sentait. Son expression favorite était » tu pus la catin ». Elle était invivable et plus elle l’était plus je retardais le soir le moment de rentrer au foyer. D’autant que si ma femme était vigilante ma fille l’était aussi, toujours une oreille qui traînait et des yeux de biche qui en disaient long sur ce qu’elle pensait de mes fredaines.
Un jour ce fut le drame, j’avais rendez vous avec ma maîtresse dans un petit bois à mi chemin de nos maisons respectives, Louise m’apparut en pleurs, » je promène me dit elle ». Nom de dieu tout mais pas cela, je tentais de la consoler, sans que je puisse faire tarir la source de ses larmes.
Nous étions paniqués, que faire, une domestique engrossée par un journalier qui plus marié était un crime de lèse majesté en nos campagnes.
La pauvre devrait passer sous les fourches caudines de la communauté villageoise. Catin, fille de joie, fille à soldats, marie couche toi là, les vocables ne manquaient pas pour la pauvre fille maladroite qui avait fauté. Bien sur l’hypocrisie était totale, bon nombre de bonnes ménagères avaient levé la jambe avant mariage et ne se voyaient pas comme des moins que rien. Les pauvrettes qui se retrouvaient dans cette situation ne pouvaient pas faire grand chose d’elle même. La communauté mariait souvent les fautifs et on portait une robe un peu plus lâche pendant les noces.
Par contre celle qui avait été prise par leur patron étaient irrémédiablement chassées et rejoignaient la cohorte des campagnardes qui poussaient jusqu’à la fille. Les petits étaient abandonnés et souvent sans le sou elles se donnaient à des souteneurs qui leur apportaient travail et protection.
Nous n’en étions pas là mais tout de même. Avec Louise on décida de trouver une faiseuse d’ange à la ville de la Roche, tout le monde connaissait l’existence de cette docte femme, mais les risques étaient grands. Nous pouvions être l’objet de poursuites judiciaires qui menaient à la prison et ensuite les risques médicaux étaient fort élevés.
Il fallait faire vite, avant que quiconque s’en aperçoive, une femme complice de nos amours trouva de l’ergot de seigle, rien n’y fit, Louise fit les travaux les plus pénibles et se frappa le ventre. Ma graine ne tombait pas. Un jour nous décidâmes que le temps n’était plus à la tergiversation et qu’il fallait qu’elle se rende à la ville. Il était hors de question que je l’accompagne, je ne pouvais prendre le risque de m’absenter. Restait bien sur le paiement de la praticienne et cela je décidais de le prendre à mon compte.
Louise se rendit à l’endroit que toutes connaissaient, un escalier sombre sale et nauséabond. Elle frappa et pénétra dans une antre nocturne. Une odeur forte et prégnante la saisit immédiatement. Elle faillit faire marche arrière.
La matrone la fit allonger sur un lit crasseux, où des taches de sang et d’urine ressortaient en de repoussantes auréoles. Elle lui fit remonter robe et jupon, sans ménagement elle lui écarta les cuisses et fouilla de ses mains douteuses son intime anatomie. Une douleur lui irradia le bas ventre, la faiseuse d’ange en fut irritée et lui dit méchamment, quand c’est ton bonhomme qui te touche tu fais moins la mijaurée. Des larmes de honte coulèrent sur ses joues.
Il était temps que tu viennes encore un peu et c’était trop tard. La vieille prit une tige en fer d’une propreté contestable et le calvaire commença, la froide tige pénétra lentement en elle. Ce cheminement parut une éternité, la douleur était forte mais fut d’un seul coup insupportable. Voila c’était fini, Louise paya puis repartit en titubant, elle souffrait le martyr et une longue marche l’attendait.
Ne sachant exactement comment elle avait pu parcourir un chemin si long dans son état, elle me raconta ses malheurs le lendemain. Elle avait évidemment reprit le travail, souffrant le martyr, mais heureusement l’enfant n’était plus.
Trois jours plus tard elle n’était pas à notre rendez vous, j’appris qu’elle était morte, son maître l’avait trouvée froide dans l’étable. Sa pauvre robe ensanglantée et les sales substances qui coulaient de son intimité apprirent à tous les causes de son trépas. On en parla peu mais chacun fit de son mieux pour sortir de sa mémoire cette pauvrette pécheresse.
Moi il ne me restait que Victoire pour satisfaire mes ardentes pulsions