1870 – 1872, Hameau de Guy Chatenay, commune de Saint Avaugourd des Landes
François Ferré époux de Rose Caillaud.
Comme il fallait bien suivre le travail, on déménagea sur la commune de Saint Avaugourd, moi je me fichais de changer d’endroit et les enfants aussi par contre ma Rose n’était pas des plus satisfaites, ma condition de journalier devait sans doute la gêner. A moins que cela soit autre chose !!
Notre dernier garçon était né la bas, nous l’avions nommé François Pierre, il ressemblait à Célina, c’est curieux quand même sur sept enfants deux seulement semblaient des copies conformes, les autres avaient certes des traits communs mais rien qui puisse permettre de les reconnaître comme des enfants de François et Rose.
J’espère en tout cas que nous n’aurions plus d’enfant, car franchement la vie était dure et je peinais à les nourrir tous, heureusement nous nous étions déjà débarrassés de Clémence notre plus vieille. Elle était maintenant placée comme servante à Nieul le Dolent chez un laboureur que je connaissais.
Un jour à la sortie de la messe ou il faut le dire j’allais rarement un homme a souri à Rose, je ne le connaissais pas il me semblait l’avoir déjà vu, une impression, un sentiment diffus. Ma femme baissa la tête mais une légère rougeur apparue sur ses joues.
Le soir je lui demandais si elle ne connaissait pas le gars qui lui avait adressé un sourire sur la place. Elle me bafouilla un non confuse, j’avais le sentiment qu’elle me mentait.
Quelques jours plus tard par un journalier j’appris qu’un gars venait de Grosbreuil comme nous, je fis l’étonné mais mon journalier me dit, mais si ta femme le connaît je les ai croisés ensemble une fois.
1870 – 1872, hameau du GuyChatenay, commune de Saint Avaugourd des landes.
Rose Caillaux, épouse de François Ferré.
Mon mari avait gagné, nous avions dû le suivre, une épouse suit toujours son mari. J’ai pourtant tout fait pour retarder l’événement mais rien n’y fit, il faut dire à sa décharge qu’il avait trouvé un emploi mieux rémunéré ce qui n’était pas du luxe avec toutes ces bouches à nourrir. Mais moi qui pensait à moi, qui pensait réellement à ce que je ressentais, personne à n’en point douter, nous étions nous les femmes prisonnières, coincées entre nos mouflets et notre bonhomme.
Je me rappelle le jour ou j’ai annoncé à mon amant que j’allais partir. Il voulait m’enlever, braver la loi. Je le persuadais que cela ne pouvait se faire que j’avais des petits et qu’enfin nous ne pouvions défaire ce que le seigneur avait lié. Je me suis donc donné une dernière fois à lui, c’est inscrit dans ma mémoire.
Dans un bois isolé, sur un manteau de mousse entièrement je me suis dénudée, m’effeuillant devant lui pour la première fois. Il m’observa, m’admira satisfait de ce beau spectacle. Pour la première fois je pris l’initiative pour dévoiler les charmes de mon homme, c’est moi qui fit glisser le paravent de sa virilité. J’étais troublée des sensations que cela me procurait.Nous avions interverti l’ordre de bienséance qui dictait depuis des temps immémoriaux que la femme se devait d’être passive.
Mais il avait fallu nous séparer, lui ne pouvant changer d’employeur, ce fut notre au revoir ce fut notre adieu.
Neuf mois plus tard mon petit François Pierre naissait, était il de lui ou bien de mon mari, une seule certitude il ressemblait à Célina comme deux gouttes d’eau.
1870 – 1872, Hameau de Guy Chatenay, commune de Saint Avaugourd des Landes
François Ferré époux de Rose Caillaud.
Dans ma tête je tentais de rassembler les éléments qui pourraient me permettre de la confondre. Mais j’avais beau chercher Rose me semblait irréprochable, toujours à s’occuper des ses enfants, toujours première au travail. Notre intérieur était toujours tenu de façon irréprochable. De plus bonne chrétienne, première à confesse et jamais ne manquait une messe.
De plus au fin fond de notre couche elle était toujours bonne femme, certes pas très participante, pas très innovatrice mais tout de fois jamais ne se refusant à ses devoirs conjugaux. Non vraiment une femme parfaite, alors pourquoi avait elle menti et pourquoi rougir comme une pucelle lorsqu’elle a vu ce paysan parmi d’autres?
Un soir je n’y tins plus, nous étions couchés et je lui posais la question si elle connaissait cet homme, elle hésita, balbutia, je compris. Une violente colère monta en moi, j’étais trompé, je lui mis une gifle, puis deux, la violence s’empara de moi, je mis les poings et frappais encore et encore. Silencieuse elle se mit en position du fœtus et reçut les coup, mais je voulais maintenant l’humilier.Je lui arrachais ses vêtement et là nue devant moi je tapais encore et encore, je la pris par les cheveux et je la tirais hors de la couche, pantin ensanglanté, elle hurlait maintenant.
Mais sur le point d’ouvrir la porte dernier rempart qui offrirait la honte de ma femme et la mienne au grand jour, je vis mes petites Marie et Clémentine qui s’étaient levées alertées par les cris. Cela m’arrêta, je lâchais Rose et partais ruminer mon tourment dans l’obscurité de la nuit.
Le lendemain quand je rentrais de ma nuit d’errance, Rose était déjà au travail, assise au cul d’une vache meurtrit dans son âme et dans son corps. Son œil présentait une couleur bleutée et sa lèvre était fendue, difficile de faire croire à quiconque d’une blessure accidentelle.
Tous imagineraient qu’elle avait mérité cette volée, de toute façon le mari avait toujours raison dans l’opinion populaire, » bats ta femme si tu ne sais pas pourquoi mais elle, elle le sait. »
Un mois après elle était morte, Rose ma Rose.