LE TRÉSOR DES VENDÉENS, Épisode 24, Marie Anne a perdu sa fleur

Mercredi 23 septembre 1846, village d’Aubigny

Marie Anne Tessier

Mon dieu que j’étais heureuse que Charles ai jeté son dévolu sur moi, c’était en mon for intérieur une évidence. Depuis mon enfance je savais qu’il serait mon Mari, lui ne m’avait jamais remarquée en temps que femme , il ne m’adressait jamais la parole et passait son chemin. Plus il m’ignorait plus j’étais attirée par ce sale type qui me dédaignait.

Les années passaient mes sentiments ne faiblissaient pas, je rêvais de lui . Mais rien qu’attendait il ?

Une fois je l’avais vu avec une femme et j’en étais restée meurtrie pendant un moment.

Puis un jour, le Charles il m’ aborda à la sortie de l’église, passa son bras autour du mien. Je n’étais pas à conquérir, je l’étais déjà. Je ne lui posais même pas la question de savoir pourquoi il avait tant attendu.

Nous fumes bien entendu très sages, enfin au début. Il fallait bien voir si nous étions un peu compatibles.

Ce fut en fin d’année 1845, nous nous promenions près du petit hameau du Monconseil. Il y avait un petit bois, nous y pénétrâmes par une petite sente, intérieurement j’avais envie de ce moment mais je le redoutais. Les feuilles mortes en décomposition dégageaient une forte odeur d’humus, le vent dans la cime dénudée des arbres jouait une belle musique, on eut dit un orgue d’église. Malgré la température très basse je n’avais pas froid. Il me prit dans ses bras, j’étais tétanisée, envoûtée, paralysée à sa merci. Si il l’avait voulu à ce moment, il m’aurait dénudée, m’aurait allongée sur la mousse et m’aurait prise que je n’aurais manifesté la moindre opposition. J’étais sa proie, sa chose.

Charles n’en était pas à ce moment de la relation entre une femme et un homme, il m’embrassa, longuement, vigoureusement .

Je sentais sa force le long de mon ventre, c’était la première fois qu’une virilité me frôlait. Je devais devenir sa femme et non point sa maîtresse, nous nous devions d’aller doucement, avec réflexion et prudence.

Tout le monde savait que nous allions nous marier, nous pouvions donc nous rencontrer sans témoin , ma réputation n’en serait pas entachée. Nos parents se connaissaient et se respectaient et il fut facile de s’entendre, les noces auraient lieu en septembre 1846.

Tout me paraissait facile, je travaillais en chantant, rien ne me rebutait, même les travaux les plus vils.

Un jour j’étais avec ma mère en train de fumer un petit champs à coté de la maison, avec des crocs nous faisions tomber le fumier. Harassant et sale, ce travail était dévolu aux femmes, Charles vint à passer et nous prêta la main. Le labeur fut vite terminé et ma mère m’autorisa à rester un peu avec mon futur. Nous étions aussi maculés l’un que l’autre, mais l’amour n’a point d’odeur. Une petite bâtisse qui servait à nous abriter lors de grosse intempérie et ou nous remisions quelques piquets nous tenta pour ce moment volé sur notre labeur.

Rien ne fut prémédité, quelques caresses, quelques baisers, Charles remonta ma robe doucement mais surement, chevilles, genoux, cuisses, puis ma toison qui ma foi était vierge de tout regard masculin. Il savait visiblement comment s’y prendre, joua avec moi en des gestes d’impudeur amoureuse. Je crois que c’était le moment, ouverte, humide je l’attendais et je l’invitais du regard. Il baissa son pantalon et je fermais les yeux, quelques secondes après je ne fus plus vierge. Une légère douleur, un mince filet de sang et la semence chaude et odorante de mon homme, de mon Charles de mon futur.

Évidemment nos rencontres suivantes ne furent qu’ingéniosité et stratagème quand on a goûté aux fruits de l’amour, on ne se contente plus de minauderies derrière le presbytère où de discutions bien sages devant des parents attendris.

Bien il fallut quand même y passer, j’avais le ventre qui grossissait à vu d’œil

Avant même que je ne puisse l’annoncer à Charles, ma mère s’en aperçut. Quitte ta robe m’ordonna t’ elle un soir que nous étions seules, je résistais mais elle commanda, nue devant elle je lui révélais tout. En fait elle ne fut guère fâchée car je pense qu’elle aussi avait jeté sa fleur du milieu avant l’union officielle.

Le lendemain, nous nous rendîmes à l’Auroire chez les Guerin, je restais dehors et elle s’entretint avec la mère de Charles. Nous étions entre gens civilisé et le mariage était décidé.

Il fallait bien avertir les hommes et en premier lieu le fautif. Ce n’est pas moi qui le prévint mais sa mère. Il se devait de se comporter en homme d’honneur, il courut jusqu’à l’Eratière. Mon père l’attendait seul à table, Charles entra. Nous les femmes en retrait nous attendions. Père se leva prit une bouteille de poire et deux verres. Sans un mot notre avenir était assuré, nos parents considérèrent qu’il n’y avait pas matière à rupture de contrat. Bien sur on jasa au village mais je n’étais pas la première à avoir mis Pâques avant les rameaux.

Le père Pelletier nous passa quand même un beau savon et prêcha dès le dimanche sur la faiblesse des âmes, sur la diablerie féminine et les tentations qu’elles provoquaient sur l’esprit faible des hommes. En bref si Charles avait baissé son pantalon en ce début de printemps c’était ma faute.

Il était impayable le père Pelletier, toujours la faute de ces foutues fumelles.

La famille se rassemblait lentement sur l’aire de battage, on m’embrassait , me félicitait, j’étais » le héros » de la fête.

J’étais un peu engoncée dans ma belle robe noire, un tablier de dentelle blanc avec une belle ceinture brodée tentaient de faire oublier que j’étais passablement enceinte d’au moins six mois. Personne n’était dupe. Mon Charles était beau comme un saint, chapeau avec ruban, souliers de cuir  neufs, pantalon et veste de coton noir. Il portait ruban à la boutonnière et le col blanc de sa chemise lui remontait sur le cou, il n’était pas très à l’aise dans ses beaux habits.

Nous avions fait les choses bien, un fifre et un violoneux allaient conduire la noce de l’Eratière au bourg, long serpent, musiciens, mariés, parents des mariés, la famille et les amis. Le vin a déjà coulé et les hommes parlent haut et fort, les enfants excités nous font cortège en chantant et en dansant.

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