Notre couple n’allait guère mieux et Marie sombrait peu à peu dans un catholicisme radical. Je ne devais plus la toucher, le dimanche jour du seigneur, pendant carême, à Pâques et pendant l’avent. Je mis un terme à toutes ses âneries assez rapidement. Le dimanche était mon jour de repos, alors seigneur ou pas la Marie, avant la messe devait lever son cotillon.
J’étais content de moi et elle outrée, elle allait à l’office à la cathédrale et moi j’allais à l’auberge de la croix d’or juste à coté de la maison. N’allez pas croire que je ne l’aimais plus ma petite cul bénie, mais bon elle était après ses quatre maternités un peu abîmée, ses seins si arrogant autrefois tombaient maintenant et son ventre plein de veinure semblait couler en de multiples plis. Moi j’aimais les femmes un peu moins grasse.
Le dimanche après midi nous allions nous promener, le port, le Mail. On se trempait également les pieds dans l’eau près de la porte des trois moulins. Il paraît que des hurluberlus voulaient faire un établissement où on pourrait prendre des bains de mer. C’était vraiment n’importe quoi. Il est vrai que l’été des cabanes apparaissaient sur la plage de galets et que des baigneurs et baigneuses vêtus bizarrement se jetaient à l’eau. Il y eut des plaintes de promeneurs car certains se dévêtaient un peu trop près du chemin et offusquaient les biens pensants. Bon ce n’était pas l’affluence qu’aurait l’endroit un peu plus tard mais tout de même nous n’y étions pas vraiment seuls.
Marie trouvait cela inconvenant mais que ne trouvait elle pas inconvenant. Nous n’allions pas plus loin et jamais nous ne retournâmes du coté de chef de baie.
Mon frère avait fait une rechute et nous l’avions déposé à l’hôpital Saint Louis, nous avons vraiment cru le perdre, car tout son corps était paralysé, mais finalement il se remit et revint travailler à la forge. Bon son comportement était des plus bizarre et il continuait à courir la ribaude. Ne pouvant prendre femme avec sa maladie je pouvais comprendre qu’il est envie de faire l’amour. Le problème résidant dans le fait qu’il propageait sa maladie partout.
Un jour que je passais rue Gargoulleau, je revis ma veuve et je retombais dans mon adultère, cette fois rien ne me ferrait abandonner cette pratique. Marie s’en douta et je pense que les commères du quartier le surent aussi. J’étais dur à contenter et ma femme me subissait aussi et elle eut à nouveau des espérances.
Avant que l’enfant naisse je me décidais à changer de travail, ou plus précisément je quittais la forge de mon père, j’en avais marre de ses excès d’humeur. Je trouvais à m’employer dans une maréchalerie sur le quai Maubec. Quel changement, je plongeais dans l’univers du port, plus de beaux messieurs ni de belle dames, mais des hommes et femmes tannés par l’air marin, le soleil et les embruns. Même le langage changeait, devenait plus frustre et imagé. Le travail était identique, mais les chevaux se faisaient plus lourds, utilisés au charrois les races changeaient. De nombreux habitants des faubourgs et des villages voisins venaient livrer leurs eaux de vie et ils en profitaient pour ferrer leurs chevaux, non pas qu’ils en manquaient chez eux car tout village possédait une où plusieurs maréchalerie.
La proximité de l’arsenal nous procurait énormément de travail également
On déménagea de nouveau et l’on trouva le gîte rue Saint Sauveur près de l’église, l’immeuble était vétuste, l’escalier vermoulu et étroit, la façade était ancienne avec du bois partout comme au moyen age. Toujours deux petites pièces, nous dormions dans la pièce principale et Jean Marie dans la pièce aveugle qui nous servait aussi de débarras. Au niveau odeur nous y avons gagné un peu, mais le canal était le déversoir de toutes les ordures de la ville. Mais ce que j’aimais c’étaient les effluves océanes et le cri des mouettes.
Ma femme allait maintenant à l’église de Saint Sauveur, le long du canal, c’était la quatrième église construite en cet emplacement, les autres avaient brûlé victimes de la furie humaine, seul le clocher gothique était un peu ancien. C’était la paroisse des marins et ces dernier accrochaient des bateaux dans l’église pour les protéger lors de leurs sorties en mer. Je ne sais si c’était efficace.
Je ne sais à qui mon épouse dédiait ses prières mais en attendant elle accoucha d’une jolie petite pissouse qui peut être intervention divine dut aux dévotions de ma femme se porta comme un charme. On lui donna le nom de Denise, avec Paul Joubert un jeune marchand de 22 ans et avec Jean Gouteron le fabriquant de chandelles nous avons déclaré l’enfant.
Deux enfants vivants sur cinq naissances ma foi nous étions dans la moyenne.
Je travaillais donc dans ce quartier très vivant et coloré, certes comme je l’ai déjà dit les appartements n’étaient guère confortables et l’on changea encore de rue pour nous loger. Nous déménageâmes rue Bletterie, dans une vieille maison à pans de bois, la aussi escalier raide comme la justice, parquet vermoulu et poutres multicentenaires, noires de suie de poussière et de crasse.
Encore le même schéma, deux pièces, l’une donnant sur la rue l’autre sur une cour, une cheminée pour se chauffer et faire cuire les aliments, notre lit serré contre un mur avec le petit berceau d’osier de Denise à coté, une vilaine table, quelques chaises cannelées, un coffre de bois de chêne et une armoire brinquebalante venue du fond des âges et ayant appartenus à feue ma mère. Il y avait aussi le bric-à-brac ménagers de Marie.
La vie fut douce pour nous rue de Bletterie, Jean Claude grandissait et devenait un petit garçon intéressant, ma femme se mit en tête de lui apprendre à lire, très bonne idée, mais ce fut avec une bible qui me mit un peu en rage. Marie me résista et je la laissais faire, après tout des écrits sont des écrits. Moi je travaillais durement de l’aube à l’aurore, de temps en temps je fréquentais ma veuve mais c’était juste pour la gaudriole.
D’autant que Marie était enceinte encore une fois, elle me traitait de maladroit, mais que pouvais je faire, elle refusait que je me retire car c’était un péché, alors évidement comme elle avait à peine 30 ans elle marquait à tous les coups.
Le 23 février 1821 nous naquit la petite virginie, encore une drôlesse, vraiment pas de chance.
Virginie prit la place de sa sœur dans le berceau et Denise se retrouva dans le lit avec son frère, ils étaient petits on verrait plus tard à rajouter une paillasse.