LES FARINIERS DE LA ROULIERE, PARTIE 10/17, LE COMTÉ DE BENON

Benon est un comté depuis des temps immémoriaux au moins depuis la construction du château en 1096, il comporte les baronnies de Mauzé, Poléon, Surgères, Nuaillé.

Le comté appartient à la famille de la Trémoille et présentement le comte actuel se nomme Charles Bretagne de la Trémoille, c’est un très haut personnage qui fréquente la cour de Versailles et qui n’a jamais été vu à Benon.

Par contre ici beaucoup de choses lui appartiennent, on lui doit hommage mais surtout redevance. C’est pour cela que notre village recèle bons nombres d’officiers, chargés des biens de ces hauts personnages. Les notaires, les greffiers, les arpenteurs, les régisseurs, les gardes portent la tête haute pendant que le petit peuple doit la baisser.

Pierre qui portant à l’échine souple se cabre parfois des prétentions de ces percepteurs du travail des autres.

Certes son moulin ne lui appartient pas mais le fait qu’il soit greffé de banalité fait qu’il a des paysans qui viennent faire moudre leur grain en permanence.

Lui pour se rémunérer, prend une part des grains et le seigneur une autre en temps que possesseur.

En outre le paysan ne peut choisir son moulin et doit aller où le droit l’y oblige.

Dans le coin les moulins sont légions et signalent aux passants comme les clochers des églises la route à suivre. Rien qu’à la Roulière il y en a quatre à vent et un à eau. Un peu plus haut en remontant au bourg il y en a un autre qui se nomme le moulin des jards.

Mais cela est encore insuffisant car il y a le moulin de l’étang et les trois moulins de l’abbaye. L’un à eau dans l’abbaye elle même et deux situés sur les hauteurs du chemin allant à Saint Sauveur de Nuaillé.

Pierre compte sur ses doigts cela fait huit moulins, rien qu’à Benon, six qui utilisent le vent et deux l’eau de la Roulière et du ruisseau de l’abbaye. Si les moulins à vent sont utilisés toute l’année, ceux à eaux sont soumis aux caprices des sécheresses estivales. D’ailleurs c’est bien simple il y en a plusieurs dans chaque paroisse, leurs ailes comme le clocher des églises indiquent à coup sûr les directions. La richesse de Benon vient à l’évidence de sa vaste forêt, les coupes bien organisées sont une grande source de richesse. Le charbon de bois réputé est aussi notablement rémunérateur. Une grande partie de la population du village est liée à cette immense sylve.

Pierre sans qu’il sache réellement pourquoi éprouve une répulsion pour  les charbonniers, ces hommes des bois qu’il juge médiocrement. Mais il fait toutefois une exception comme le sent avec son instinct féminin son épouse

Régulièrement il va à la Grenouillère où sont logés les gueules noires, il pénètre dans une sorte de quereu près du nouveau cimetière et là une drôlesse l’attend. Elle est jeune, pas entièrement désintéressée mais il s’en moque car il croit qu’il a l’exclusivité de son ventre juvénile.

Dans le coin on en rigole, la chose est supposée sinon sue, le cossu farinier est victime de ses sens comme d’ailleurs beaucoup d’autres.

Ces visiteurs ont un point commun, c’est celui de croire qu’ils sont les uniques bénéficiaires de cette gamine au cul aussi sale que la goule. La petite garce au visage  maculé de charbon de bois est moitié femme moitié enfant. Une robe noire de crasse et déchirée, une chemise autrefois blanche mais maintenant teintée des aléas de la vie constitue son unique viatique vestimentaire. La petite est légère sans doute mais est mue par un sens poussé des affaires. Elle fait croire aux hommes en manque de femme qu’elle ne remonte son jupon que pour eux. Elle ne répugne à rien du moment que vous arrivez le gousset plein. Pierre comme chaque fois comme un couillon tend sa pièce. La drôlesse soulève son jupon crasseux et offre ses charmes. L’affaire faite le meunier se reculotte et la petite d’une brassée d’herbe nettoie ses frêles cuisses.  Le village est petit et le commerce de la charbonnière est connu de tous. C’est bien un relent de scandale qui anime les femmes du village et plusieurs qui croient que leur mari s’encanaillent là bas  parle d’aller lui tanner le cuir des fesses avec un battoir à laver. Les mauvaises langues parlent même de visiteurs vêtus d’aube noire . C’est surement faire injure au cher curé et aux bons moines de l’abbaye. Finalement la garce gardera son cul lisse, les jeunes hommes continueront à y laisser leur pucelage entre ses vals, les vieux y dépenseront l’argent de leur tabac et les autres croiront en leur vanité d’avoir conquis une jeunette pour leur exclusivité.

Marie Fleurissonne se sent un peu soulagée, sa dernière grossesse lui a causé beaucoup de dégâts et le délai de retour de son mari entre ses cuisses a été plus long que les simples relevailles.

Un peu de répit donc dans les grossesses, mais 6 enfants gravitent dans ses jambes, l’aînée Marie âgée de 10 ans l’aide beaucoup, mais les grosses taches lui reviennent encore.

De plus ce n’est pas la petite qui lui évite la corvée de la tétée, les deux dernières lui tirent dessus comme un via sur des pis.

Mais le malheur arrive de nouveau, fin 1720 elle est encore prise, elle en parle à Jeanne sa belle sœur, cette dernière connaît une espèce de sorcière au hameau de Rioux qui a la réputation de pouvoir.

C’est donc une sacrée course qu’elles doivent faire toutes les deux, Rioux est une annexe de la paroisse du Gué d’Alleré. Elles doivent se faire discrètes car leur présence là bas n’est en rien justifiable. Elles sont aussi étrangères que le serait des négresses où des moresques. Au loin elles voient les ailes du moulin David, puis longeant la Roulière elles arrivent chez la faiseuse d’ange.

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