Né il y a maintenant de nombreuses années, il est temps de se retourner et de faire le point.
J’ai vu le jour dans un champs de bonheur, mon enfance fut heureuse et insouciante. Notre petite maison blottie au pied de l’usine où travaillait mon père était un nid de quiétude.
Des parents aimants, peu de moyens, aucune envie grandiloquente, le cheminement idéal pour qu’un enfant s’épanouisse.
Mais nul endroit fut-il fleuri lorsqu’ arrive le bourgeonnement de l’adolescence, ne saurait contenir les envies de départ.
Scrutant inlassablement l’univers restreint du bout de ma rue, ma pensée rejoignit des lieux plus lointains.
Réussissant enfin à m’envoler je quittais l’idyllique jardin de mon enfance, un train de nuit me déposa les yeux rougis de sommeil sur un quai. Une valise à la main je suivis avec d’autres mon destin. Les effluves iodées remplaçaient l’odeur acre de la pulpe sucrière.
Le choc fut rude, mon bel uniforme compensant à peine la rudesse de ma nouvelle maison.
Une impulsion me fit dévier de ma route première, un voyage en avion me rapprocha de mon futur.
L’endroit où me conduisit ce vol n’était pas non plus paradisiaque. Ce fut pourtant le cadre de ma jeunesse, avec mes nouveaux compagnons nous formâmes une nouvelle famille.
Nous étions tous plus occupés à nos plaisirs qu’à la construction de notre avenir, hélas pour ce dernier, mais que de bonheur dans ces années dissolues. Douce insouciance
Puis vint l’amour, impétueux et violent des premiers sentiments, torrent tumultueux vite asséché mais source de souvenirs intarissables.
Puis la séparation d’avec cette famille régimentaire se fit, chacun gagna le terrain de sa vie.
Le mien était encore mouvant, mais une ligne d’horizon se profilait. Cupidon avait de nouveau frappé de ses flèches, poursuivant encore ma première destinée j’étais déjà enferré dans un nouveau monde. Ce choix fut-il le bon, je ne saurais le dire. Il est plus difficile de prédire son avenir que de lire son passé.
Arriva le premier rhizome de mon arbre et l’édification de son jardin. Tout à ce dernier, puis au suivant, mon champs de vision se rétrécit soudain.
Nouveau cocon, bonheur différent, je n’étais plus l’enfant mais le parent. Hélas, trois fois hélas, mortelle décision je m’envolais de nouveau. Je me rapprochais de mon ancien jardin mais ni trouvais que friches.
La grande maison comme on la nomme, ne fut pour moi guère attrayante. Mais on s’adapte même au pire et le vent parfois change de sens.
Voyageur obligé je le fus, mes petites boutures requéraient mon attention constante. Les années me parurent bien longues devant régulièrement m’extirper des bras du bonheur pour plonger dans ceux du labeur.
Puis vint le drame, mon amour sans fut, nous laissant mes jeunes pousses et moi même dans l’affliction totale. Le vent de la vie continuait à tourbillonner même si un membre de l’équipage était descendu du navire de la vie, nous étions contraints mes petits passagers et moi de continuer notre traversée vers des jours meilleurs.
Après le mauvais temps revint le soleil, il dardait de toutes ses forces j’en cueillis les rayons.
Au dessus du vaste océan, l’improbable rencontre entre deux astres. Fusion des corps et des âmes, Saturne et Vénus groupèrent alors leurs satellites. De cette union stellaire un nouvel anneau survint, désormais nous ne faisions plus qu’un.
Il fallut construire un nouvel havre, nous nous y attelâmes
Le bonheur empêcha la tache d’être ardue.
Est ce que chacun y trouva son compte, opaque mystère, chaque jardin n’est pas composé de la même terre.
La vie est un sablier retourné dont le fin contenu s’écoule très vite, le bonheur masque les années qui passent, idylliques instants dont la perception nous échappe. Ces derniers se transforment en souvenirs pour nous faire regretter qu’ils fussent déjà passés.
Mais comme moi jadis mon champs de fleurs, les oisillons quittèrent aussi leur nid, fuyant l’univers qui leur paraissait restreint, ainsi va la vie , ainsi va le temps.
Dans la ouate du bonheur cosmique le temps passe vite, les entités nées du chaos initial se détachent et fondent à leur tour des nouvelles galaxies.
Nous sommes maintenant presque seuls à bord, je viens d’arriver à ma dernière escale.
Les années passent, la vision que l’on s’était faite du monde change imperceptiblement, la place que l’on s’y était faite se réduit et bientôt il semble que nous dussions partir.
Sans un regret quittons un univers qui lui ne nous regrette pas, années vaines où l’on cherche une place, là où il n’y en a pas.
Il est temps pour moi de vivre ma vision de la vie, tel Éole sortant de son outre, le vent de mon bonheur prend la direction que j’ai choisie
Plus de vent, plus de tempête, le soleil, la quiétude. Belle saison qui j’espère ne sera troublée par aucun nuage. Les quais du port par moi construits sont maintenant vides, seuls quelques petits navires viennent parfois y accoster redonnant vie à l’endroit.
La vie me fut-elle souriante, ai je été maitre de mon destin, ferais je la même chose si une autre vie se présentait à moi ?
Je me refuse à me poser la question, seule demeure en moi l’interrogation finale, combien de temps durera cette dernière merveilleuse escale ?
J ai pris beaucoup de plaisir à voyager avec toi . Merci très beau texte.
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merci pour ce voyage qui est un peu le notre egalement
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superbe errance merci pour ce témoignage fort d’une vie
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merci pour ce témoignage de vie (tres beau) Mon mari a eu le même enfin presque puisque je suis toujours là apres 53 ans de mariage .Lui il etait basé a Toulon et dans les sous marins
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Bonjour Pascal 😊
Vous écrivez merveilleusement bien … ce texte est magnifique … j’ai ressenti un immense plaisir à le lire.
La vie est ce que l’on en fait, composée de hauts et de bas ….
Merci !
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