CEUX DE LA RUE DE L’ESCALE, PARTIE 29, LE PROFITEUR DE CES DAMES

 

Charles a noué autour de son cou le magnifique foulard qu’elle lui a donné, Eugène en crève de jalousie, Henri le petit frère veut quand à lui l’emprunter pour un premier rendez vous. Le jeune homme a changé, lui qui était si timide, si réservé est maintenant plein d’une mâle assurance qui fait retourner sur lui toute la gente féminine. Conscient de son potentiel de séduction, sûr de sa beauté et de son charme il entend bien en profiter pleinement.

Rose qui l’avait aidé à sortir de sa carapace de timidité n’est plus qu’un lointain souvenir. Marie qui entendait bien le marier n’a été qu’un corps de passage, un objet de plaisir. On dit qu’il y en a eu d’autres, mais personne ne les connaît, lui s’en vante comme autrefois son frère Eugène se vantait de lutiner la petite Rose des Admyrauld. Ce qu’on sait et il ne s’en cache pas, c’est que la belle est de condition. Son père qui sent les ennuis arriver tente de lui tirer les vers du nez, mais Charles rigole, hausse le ton et tourne en dérision son père .

Il fait une chaleur infernale et la blancheur de la rue de l’Escale restitue les rayons du soleil avec générosité. Les roses trémières qui ont osé dévier les pierres et les pavés ne sont plus que de longues tiges desséchées où persiste ça et là une fleur mauve ou blanche. Il y a peu de monde dans la rue, les ateliers sont fermés et les nantis sont en leur campagne ou bien se promènent sur le mail au bord de l’océan.

Charles longe les murs du coté de la rue où se trouve les porches, il se fait discret. Il n’a pas loin à aller, le numéro 25 est en face, il voit la porte qui s’ouvre et pénètre derrière la femme qui lui a ouvert. Les deux amoureux s’enlacent dans l’escalier, Charles est tout de suite entreprenant et passe sa main sous la robe de la demoiselle. Il a choisi avec celle-ci la domination.

L’immeuble est désert et ils le savent, ils entrent dans l’appartement et l’hôte des lieux ferme la porte à clef . Les propriétaires se sont absentés pour plusieurs jours et la domestique a sa journée.

Louise a enfin son Charles, elle a enfin réalisé ses rêves intimes. Cela va bien au delà car Charles qui a deviné la faille de la vieille fille, entend bien profiter de l’aubaine, à lui le déroulement de tous ses fantasmes, accompagné de petits cadeaux substantiels. Il a compris qu’il devait la tenir en haleine, ne rien lui promettre, de presque la faire chanter en jouant sur son appétit sexuel.

Louise est aveuglée et ne perçoit pas que Charles profite d’elle. Elle lui a donné son corps ainsi que son âme. L’un ne va pas sans l’autre après l’avoir repu de sa jeunesse il peut lui demander ce qu’il veut. Elle dépouillerait ses parents et les biens de l’évêché si il le fallait. Pour le moment, elle se fait sage petite fille, nue comme au premier jour, elle attend que Charles daigne lui faire l’amour. Lui se fait plus fauve, plus exigeant et avant de la prendre, il veut qu’elle lui promette d’ouvrir sa bourse. Elle accepte tout, pourvu que.

Elle pensait le garder toute la sainte journée mais lui tel un contrebandier qui fuit un douanier se sauve avec une jolie pièce qu’il veut dépenser sur le port dans quelque taverne.

Louise enroulée dans un drap comme une déesse antique laisse aller sa frustration et geint comme une jeune biche qui n’a pas eu les hommages du cerf.

Ses pleurs n’ont pas suffit pour le retenir, son corps plein d’un érotisme torride n’a pas pu le saisir de nouveau. Elle est frustrée et sent que sa volonté vacille. Elle voudrait le posséder pour elle seule, voudrait qu’il partage sa vie, voudrait dormir avec lui et se repaître de sa sauvagerie. Mais elle sait que ce n’est pas possible, trop de différences les séparent, jamais ses parents ne consentiraient à une telle union. Mais d’ailleurs lui voudrait-il s’unir à elle, rien n’est moins sûr. Elle s’endort plein de lui mais aussi plein de doute, sa volonté vacille. En fin d’après midi, elle se réveille en sursaut, elle n’est pas seule, elle croit qu’il est revenu, se met à roucouler, à poser lascivement. Un bruit de gorge, elle ouvre les yeux, ce n’est pas Charles, mais Rose Vivien la bonne. La servante n’est point sotte et comprend que Madame pratique, que la demoiselle est aussi une femme.

Elle se fait rapidement congédier et va à l’office en se demandant qui est le galant. Dès demain elle mettra en branle son réseau d’informateurs domestiques pour dénicher le nom du bien heureux.

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