LE COMMUNARD DE LA ROCHELLE, PARTIE 6, LA FAMINE

La faim est telle que l’on aurait mangé de l’éléphant .

 

 

Dans Paris la situation s’aggrave outre les combats qui se poursuivent avec leurs lots d’héroïsme et de déshonneur il y a les blessés et les malades qui s’amoncellent dans les hôpitaux. On manque de tout pour soigner ces malheureux, l’incurie des gouvernants fait gronder le peuple. Mais il y a encore plus grave pour les masses, le manque de vivres devient problématique, les files d’attentes se font de plus en plus longues, on s’énerve, on s’invective. Les femmes passent de nombreuses heures à attendre, parfois c’est bon enfant, parfois la tension est telle qu’on se bat pour un morceau de pain noir. L’autre jour Agathe à mis une volée à une resquilleuse, ce n’est pas une solution mais elle est revenue comme sil elle avait vaincu les prussiens.

Un soir fièrement Auguste ramène chez lui un morceau de rôti de cheval, on le savoure presque en cachette, il n’y aura bientôt plus. Il n’y a plus guère de chiens, ni de chats, la faim tenaille les ventres, les enfants pleurent et les vieillard s’éteignent. On dit même que des animaux du jardin d’acclimatation ont été mangés. Auguste lui n’a plus guère d’ouvrage, les chantiers ferment alors il aide à la défense, creuse des trous, érige des barricades. Il y gagne une soupe, il y gagne un immonde pain noir que même les poules ne mangeraient pas.

Les deux amant ont décidé de ne manger que le midi, le soir ils dîneront de leur corps et  finiront de s’épuiser dans des joutes amoureuses.

L’hiver va être terrible, il n’y a plus de gaz, plus de charbon, la température est négative. Agathe pas très grosse, devient maigre, elle tousse, inquiète Auguste. Lui se priverait pour elle mais rien n’y fait si elle ne le voit pas manger, elle ne mange pas.

Il n’y a pas d’épidémie mais la mortalité bondit, le froid et toujours le froid multiplie les maladies pulmonaires.

La ville est triste sans éclairage, les rues deviennent même dangereuses, une pauvre fille a été violée par des soldats. Les autorités ne font rien c’est l’incurie.

Le 5 novembre 1870 s’est l’élection des maires d’arrondissement, Agathe enrage de n’avoir pas le droit de voter. Auguste dit que les femmes sont trop sottes pour le faire. Elle va lui crever les yeux avec une aiguille à tricoter, lui en rigole. Le soir il fait nuit de bonne heure et les appartements sont tous plongé dans le noir, plus de chandelles depuis longtemps. Auguste susurre à Agathe qu’il va lui faire un petit. Au rythme ou il font l’amour cela risque bien d’arriver. La mère met en garde d’un grand malheur si cela arrivait, elle fait la leçon à sa fille parle crûment et dit qu’Auguste il faut qu’il saute en marche. Agathe et Auguste en pleurs de rire.

Auguste pour tromper la faim se rend le soir dans des comités, bien sûr il ne prend jamais la parole, son niveau d’instruction n’est pas suffisant pour exprimer une opinion. Il écoute simplement les orateurs qui vilipendent le gouvernement de défense nationale et qui le soupçonnent de ne pas mettre en œuvre une politique assez agressive pour faire rompre le siège de Paris. Cette minorité de gauche enflamme son auditoire et l’appelle à la résistance. Auguste quand il sort de là est comme transcendé, prêt à mourir. Souvent il emmène Agathe avec lui, puis prolonge la soirée avec d’autres ouvriers, ils refont le monde.

Mais les discussions ne nourrissent pas, Agathe et sa mère passent leur temps à faire la queue, il n’y a plus rien, la résistance s’amenuise .

La mère d’Agathe tombe malade, rien à y faire, il faudrait qu’elle mange, mais rien ne vient. Des soupes populaires sont organisées mais le rata est maigre alors on pense au pire.

Les activités sont à l’arrêt, Auguste ne travaille plus,il se ronge les sangs et fréquente les clubs révolutionnaires.

La fête de noël est lugubre , personne n’a envie de faire la fête, la mère d’Agathe étant alitée on décide de rester avec elle pour une veillée. On évoque bien sûr la reddition et la responsabilité des gouvernants.

C’est dur mais finalement on résiste, le 18 janvier 1871 le gouvernement décide une ultime tentative de sortie, elle a lieu le 19, Auguste décide de suivre les soldats et les gardes nationaux, l’attaque se porte en direction de Versailles, Saint Cloud est pris, le parc de Buzenval également, ainsi que Montretout. Mais par l’incompétence  des chefs encore une fois, les réserves ne suivent pas, il fait froid, il pleut , les troupes meurent de faim, les prussiens contre-attaquent, la retraite est ordonnée par le général Vinoy. Auguste pour la première fois de sa vie fait le coup de feu avec un chassepot qu’il a récupéré sur un soldat mort.

L’ennemi a repris les positions, il y a quatre milles morts, c’est énorme pour une absence de résultat, la fin semble proche. Agathe folle d’inquiétude est allée au devant des troupes, elle retrouve son homme dans un bien triste état. C’est décidé ce soir là elle reste dormir avec lui, dans un moment pareil on se fout bien des convenances. Le 21 janvier les délégués de la garde nationale et les clubs politiques décident d’une action pour le lendemain 22. Le rassemblement se fera devant l’hôtel de ville. Les deux amants en sont, ils crient, ils vitupèrent, c’est bon enfant mais un rien peut transformer ce mouvement en carnage. Mais ce n’est pas la foule des grands jours, la force manque quand on a faim, une délégation est reçue par l’adjoint au maire Chaudey. Soudain un coup de feu part sans qu’on puisse précisément dire d’où il vient. Les gardes mobiles bretons qui défendent l’hôtel de ville ouvrent le feu, des hommes tombent à coté d’Auguste et d’Agathe. Ils se jettent à terre, les gardes nationaux présents ripostent tandis que la foule se sauve en tous sens. Les deux amoureux main dans la main réussissent à s’enfuir, ils ont peur. Les meneurs sont arrêtés dont Charles Delescluze, les clubs sont interdis.

Le 26 janvier 1871 c’est l’armistice, la guerre franco prussienne est presque terminée.

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