CEUX DE LA RUE DE L’ESCALE, PARTIE 6, LES SERVITEURS DE MADAME

Au 24 de la rue de l’Escale André Baumers *,  sûr de sa supériorité masculine prend doucement la direction de la maison. Il entend que tout plie sur son passage, il entend que tous s’accordent à lui donner de l’importance. Si éventuellement sa qualité d’homme lui confère une importance particulière sa qualité de domestique ne l’y autorise absolument pas.

La maîtresse de maison, madame Vincens endeuillée par la disparition de son mari et qui ne s’est jamais remise de sa mort, a comme abdiqué. Depuis le début de sa propre maladie elle a perdu toute autorité sur son foyer. Son amie et voisine Zoé Bredif pourtant l’informe sur l’arrogance et la roublardise de Baumers.

Ce dernier se vante dans toute la rue de sa position dans la maison, pour un peu il aurait pris la place de feu monsieur le Sous Préfet Emmery.

André joue le Monsieur, bâfre à l’office, parle mal à Mdame et lui soutire des gages indus. Il est soutenu dans son arrogance par la petite Geneviève, elle n’a pas froid aux yeux, n’y au cul et le foyer tourne à la débauche. La seconde bonne Marie Maingrin est la victime de ces deux là, l’on dit même qu’André l’oblige à faire des choses. Les ouvriers de l’imprimerie et de la tonnellerie se moquent de bon cœur lorsque la sainte nitouche et vieille fille passe devant eux. Elle ne soupçonne pas ce que dit Baumers sur elle, mais sans le savoir, elle rougit des allusions graveleuses des ouvriers.

Ce soir là Marie et Geneviève ont couché leur maîtresse, la nuit n’est même pas entamée qu’elles sont déjà tranquilles. Elles savent que Madame ne se relèvera pas seule et elles ont la maison pour elles. Si cette dernière a besoin, elle a sa clochette et sonnera l’une d’elles.

Marie termine son travail dans la cuisine alors que Geneviève est déjà partie rejoindre André. Elle entend du bruit dans la chambre de feue Mademoiselle Pauline, la fille de Madame et Monsieur décédée bien avant qu’elle ne prenne son service chez eux. Par dévotion ou souvenir madame Vincens a figé la pièce en un sanctuaire inviolable.

C’est bizarre car la clef de la chambre est dans la vieille commode d’acajou sous l’antique uniforme de sous préfet de monsieur. Marie pas très rassurée, sur la pointe des pieds traverse le couloir parqueté en point de Hongrie. La porte de la chambre est à moitié ouverte, elle reste stupéfaite, Geneviève allongée sur le lit la chemise relevée au dessus de ses fesses blanches offre son intimité en offrande au désir d’André. Elle veut fuir mais le spectacle la cloue sur place. Pendant un court instant la honte la submerge mais la curiosité prend le dessus. En fait c’est la première fois qu’elle voit des ébats. Marie n’a jusqu’à présent connu l’amour qu’une seule fois, mais peut on parler ainsi de ce qui lui était arrivée un soir dans la chambre de bonne qu’elle occupait chez ses précédents employeurs.

Baumers pantalon en bas des jambes, déguste avec avidité l’origine du monde de sa compagne. Marie est tétanisée du spectacle, elle est outrée mais n’arrive pas à détacher son regard. Elle n’imaginait pas qu’un homme fasse cela à une femme. Elle bouge pourtant et le vieux parquet grince alertant André. Dans le plus simple appareil il se dirige vers la porte, Marie reste immobile, lui rigole tout son saoul, conquérant il l’attrape par le poignet et la force à rentrer dans la chambre pour assister ou participer aux ébats. L’impudique Geneviève se tord de rire sur le lit, Marie s’échappe malgré tout . Ce n’est qu’après avoir bloqué sa porte de chambre avec sa chaise qu’elle respire un peu. Elle passe sa nuit habillée sur son lit, guettant le moindre bruit.

Le lendemain la maison est d’une tranquillité absolue, dans la cuisine Marie découvre Geneviève dégustant un bol de lait encore en chemise de nuit. Mais Madame sonne, il faut aller s’en occuper.

Madame Vincens a mal dormi, elle dit à Marie  » vous direz à André de chasser les souris dans la chambre de ma fille, elles ont dansé toute la nuit et je ne veux pas qu’elles occasionnent des dégâts dans les affaires de Pauline. »

Toute la journée Marie tremble de croiser Baumers, le soir sa peur augmente avec raison. Il est à peine minuit qu’elle sent une présence dans sa chambre. Elle n’a pas le temps d’hurler, ni d’allumer sa chandelle, il est sûr elle. Pour qu’elle n’alerte pas, il lui met violemment la main sur la bouche, elle a mal. Son haleine est alcoolisée, il lui dit de ne pas bouger. Marie est tétanisée, mais sa terreur augmente quand Baumers lui soulève son jupon, elle n’a plus de force, ne peut rien tenter.  Il la retourne et se frotte à elle, des larmes coulent sur son visage et noie les draps. Mais alors qu’elle se voit déjà forcée, André se retire en rigolant. Elle est toujours pétrifiée quand il lui dit,  » tu as intérêt à te taire sinon tu y passes  ». Elle ne répond pas car une énorme claque s’abat sur ses fesses nues. Elle est soufflée, outragée, honteuse et s’attend à recevoir  une correction mais elle entend Marie qui tire Baumers en dehors de la chambre et qui lui dit  » vient elle a compris  ».

Marie ne sait à quel saint se vouer alors en attendant, elle pleure.

 

Marguerite Elise Emmery née à La Rochelle le 19 aout 1795, décédée le  10 décembre 1851 rue de l’Escale à La Rochelle

Elle s’est mariée le 27 décembre 1813 à La Rochelle avec Amédé Louis Paul Vincens, sous préfet à Rochefort, baron, chevalier de la légion d’honneur, né le 11 aout 1782 à Paris et décédé le 31 juillet 1847 à La Rochelle.

Ils ont une fille Louise Pauline né le 30 décembre 1825, rue Saint Léonard à La Rochelle, décédée le 29 novembre 1836, rue porte Neuve à La Rochelle.

 

André François Baumers né 22 octobre 1826 commune de La Laigne (17 ), s’est marié avec Geneviève Clion née le  2 novembre  1826 à Lagord (17) ,  le 27 juillet 1853 à La Rochelle.

Baumers s’écrit sur certains actes avec un t à la place du s

 

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