L’INFANTICIDE DE LA MARE, ÉPISODE 1, L’AMOUR AU CLAIR DE LUNE

Allongée dans son lit , Louise attend que la maison soit complètement silencieuse. Elle n’entend plus rien depuis un moment mais préfère être sûre que ses patrons soient complètement endormis.

Sa chambre jouxte la leur, alors elle connaît par cœur leurs habitudes. Les deux vieux ne se couchent jamais très tard et c’est toujours le même rituel qui entoure le coucher de leur royale personne. En général le vieux se met à ronfler rapidement, une vraie corne de brume, Louise se demande comment sa femme peut s’endormir à coté d’une telle forge. Puis madame se relève pour aller au pot, cela ferait sourire Louise si le matin elle ne devait vider ce seau émaillé.

Ensuite au bruit fort du père Renard succède celui plus sifflant de sa femme qu’au village on appelle la Renarde.

C’est le moment, Louise soulève son drap, elle est encore habillée, saute de son lit et à petits pas sort de sa chambre. Elle n’est guère rassurée, sa porte grince, le parquet couine, elle a l’impression que des dizaines de grelots sont attachés à ses vêtements et qu’elle va alerter tout le village de Limoges.

Il n’en est rien, elle se jette dans l’obscurité. Elle ne craint rien mais elle a toujours eu peur du noir. Depuis son enfance c’est sa hantise, ses jambes ne la portent guère mais pourtant elle se retrouve à la sortie du village.

Dans le halo de la clarté lunaire elle l’aperçoit, rassurée elle court et se jette à son cou.

Elle l’embrasse à pleine bouche, leurs langues se mettent à danser. La salive de son amoureux a un goût légèrement alcoolisé, elle se mélange à la sienne pour donner un breuvage magique. L’étreinte est forte mais il ne faut pas qu’ils restent là. Le bois des charbonniers n’est pas loin, ils seront mieux là bas sous le couvert. Louise est chaque fois terrorisée de pénétrer dans cet antre obscur. Mais comme abri de leur amour ils n’ont rien d’autre de plus sûr. Ils ne sont pas mariés et les patrons de Louise ne toléreraient jamais qu’elle ait une liaison en restant à leur service. Mais l’amour est trop fort, le désir qui la tenaille tout le jour n’est qu’assouvi sous ce toit protecteur.

Presque chaque soir ils se retrouvent, le cérémonial est immuable, seulement tourmenté par les aléas climatiques.

Lorsqu’il fait beau un lit de mousse reçoit le corps dénudé de Louise, c’est comme dans un conte féerique, la lune permet d’entrevoir les corps. Les courbes magnifiques de Louise sont mises en magnificence par la faible clarté qui se joue des cimes des ormes tortillards. Elle est grande, élancée, son visage d’un parfait ovale est magnifié par son teint clair de blonde. Sa bouche grande et bien dessinée est une invite aux baisers. Louise déplore un grain de beauté à la racine du nez, c’est son handicap, son infirmité, cela fait rire son homme qui lui n’a cure de ce détail.

Sa poitrine dans les bras de son amant se soulève doucement, ce léger mouvement en augure d’autres. Les doigts du garçon dessinent des volutes sur le corps de Louise, bientôt il joue avec les premiers frisottis de la toison. La lune se fait coquine et semble vouloir se refléter dans ce petit champs couleur de blés murs. Louise qui n’aime guère la passivité s’active en multiples caresses. Au bord de la folie orgiaque les deux amants s’unissent, leurs corps n’est qu’un et  leurs âmes se rejoignent. Les oiseaux diurnes se taisent, la ramure des arbres ne frémit plus, les animaux de la forêt s’immobilisent, tous attendent la jouissance des deux humains que l’amour lie.

Chaque soir la scène est magnifiquement rejouée et le public toujours satisfait.

Mais une nuit Louise galopante arriva au rendez vous et n’y trouva personne, elle attendit inquiète. Il ne vint pas ce soir là ni d’ailleurs les soirs suivants.

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