
Dans Provins le mécontentement gronde, certes il faut bien des filles pour la satisfaction des hommes, cela permet aux légitimes de souffler un peu entre leurs grossesses et aux officiers d’avoir une troupe apaisée. Mais à l’infirmerie le major lui rigole moins, à la queue leu leu, la bite entre les mains ce n’est qu’un défilé.
Ce n’est plus le 22ème dragon, mais le 22ème chtouilleux. La consommation de mercure augmente au rythme des exemptés. Si il faut aller se battre, on va avoir l’air malin. Le colonel se plaint au juge, qui en parle au procureur, qui se répand auprès du maire, qui lui engueule le commissaire.
C’est encore l’officier Vaillant qui intervient et qui interpelle Julie. Cette fois c’est plus grave, la Blondelot traîne depuis quelque temps avec une gamine de 14 ans. Joséphine Maugier une môme presque enfant qui lui est tombée dans les bras par misère. Elle l’a formée au métier, l’a faite dépuceler par une connaissance et maintenant lui fournit une belle clientèle. Ce n’est pas tant les soldats qui raffolent de cette poupée mais plutôt quelques bourgeois au ventre gras. Cette presque garçonne aux seins plats, aux poils rares émoustille les sens et bouleverse les convenances.
Julie est donc accusée d’incitation d’une mineure à la débauche, d’outrage à la pudeur et de vagabondage. Elle prend un an et un jour, des larmes au prétoire lui viennent, elle sait qu’elle va aller en centrale.
Après le départ de Julie pour le zonzon la sérénité semble revenir au sein de la famille, certes Alphonse le père depuis la chute qu’il a faite d’un noyer, est plus ou moins infirme, en tous cas impropre au travail et c’est Alphonse le fils qui nourrit la famille.
Il a d’ailleurs été exempté de ses obligations militaires à cette fin.
Joséphine aide aussi ses parents mais elle vit seule et a du mal à joindre les deux bouts, il lui faudrait un mari mais elle se contente d’aventures passagères.
La bonne nouvelle de l’année 1885 est le mariage d’Alphonse avec une jeune domestique de Saint Brice, il n’y a pas encore de petits enfants chez les Blondelot mais cela va venir.
Bien entendu Julie sortie de prison n’a pas été invitée, car bien évidemment son séjour chez grand-mère ne l’a pas assagie.
Elle habite dans le quartier des Murot et il s’en passe de belles là bas. Le 30 mai 1885 c’est le garde champêtre Pelletier qui lui met le grappin dessus et la conduit à la maison d’arrêt . Encore une fois le motif est le même, excitation à la débauche d’une mineure, et outrage publique à la pudeur, autrement dit elle offre le corps de la petite Alice Burgard 16 ans et bien entendu le sien.
Elle n’est pas la seule à être inquiétée, car on ramasse aussi Geneviève Boyer, femme Poulain, elle a 55 ans et ne lésine pas sur le racolage afin de compenser son age désavantageux. Elle aussi a déjà été condamnée mais pour vol. Cette fois c’est plus sérieux car on l’accuse de prostituer sa fille.
Elle est pourtant mignonne la femme Mélique fille Blondelot dans sa robe verte, avec son jupon et son tablier bleu, on lui donnerait le bon dieu sans confession. Elle a même de l’élégance avec sa chemise de coton, ses bottines et ses bas rouges. Elle perd certes un peu de sa prestance après chaque incarcération mais sa jeunesse remédie à tout.
Le dix juin 1885 la chose ne traîne pas elle écope de deux ans, la femme Poulain de 10 mois. il est vrai que vendre sa fille est grave mais c’est la première affaire de ce genre à son actif alors le juge est un peu indulgent.
Le 4 juillet 1885 on la transfère à la maison centrale de Clermont en compagnie de dame Poulain
Là bas on va s’apercevoir qu’elle est enceinte, c’est une belle histoire pour une prostituée que de le devenir , après tout ce n’est pas un problème elle est mariée, le Mélique va bien assumer son rôle, ne l’accueille t’-elle pas dans son lit de temps à autre.
Le 21septembre par humanité et par instruction ministérielle elle revient à la prison de Provins.
Le 19 octobre 1885 elle rentre à l’hôtel Dieu sis rue Saint Thibaud, elle y accouche d’une fille le 15 décembre, on la nomme Henriette Albertine. Elle prend le nom de son père qui déclare vivre avec sa femme à Chenoise. La morale est sauve, notre prisonnière qui offrait son corps à tout va se déclare mariée et vivant avec son mari. Cela en fait ricaner plus d’un.
Elle réintègre sa cellule le 4 janvier 1886.
Le temps doit lui paraître bien long, en mai elle apprend qu’elle est veuve, le soit disant père de sa fille est décédé à Meaux à l’age de 34 ans ce n’est vraiment pas un äge pour mourir. Au vrai elle est un peu peinée, ce n’était pas un amour passionné car sinon elle aurait peut être adopté une autre manière de vivre.
A la fin de l’année c’est son père Alphonse qui rend son âme à Dieu, il n’a que 60 ans mais sa vie dure de couvreur, plus les tracas occasionnés par ses filles l’ont prématurément transformé en vieillard. Joséphine devient veuve à 54 ans , la situation devient de plus en plus dure pour elle, elle doit nourrir son dernier.