
Charles avait senti le vent du couperet sur sa nuque et n’en menait pas large à la Belle étoile, le père Joseph fulminait d’avoir un fils aussi crétin et la mère Louise n’osait plus se montrer au village. La honte s’abattait sur la famille, vraiment il y avait bien d’autres femmes à trousser qu’une gamine de quinze ans. Ne pouvait-il pas attendre comme tant d’autres le mariage.
Puis les résultats des analyses tombèrent, on ne put relier la mort de Suzanne à une quelconque absorption de produits abortifs. Le 14 août Lapleige put retourner en son foyer ainsi que Truchon. Seule la mère fautive d’avoir livré sa fille aux hommes dut restée emprisonnée.
Le trois janvier 1913 le tribunal de Coulommiers, condamna Lucie Delbret à trois ans de prison et 500 francs d’amende, Truchon à 15 jours et 25 francs d’amende, Lapleige trois mois de prison et cent francs d’amende, Perrin à 8 mois de prison, Lefort quinze jours de prison et 25 francs d’amende, Fauvet 100 francs d’amende et Nolin 50 francs.
Ils firent appel et Lucie fut transférée à Paris le 13 janvier 1913.
Curieusement le jugement le 23 avril 1913 en cours d’appel ne fit pas la une des journaux et rien ne vient signaler les nouvelles peines.
Il semblerait toute fois que Charles Perrin ne fit aucune prison et que sa peine fut de 100 francs d’amende pour outrage publique à la pudeur. On ne voit pas d’ailleurs pourquoi il aurait été condamné à tant de prison alors que Lapleige et Truchon ne firent que 15 jours.
Truchon lui n’eut aucune mention de l’affaire dans son livret militaire, sa peine de prison en préventive couvrant sa condamnation.
Lapleige, en dehors de sa préventive ne fit pas plus de prison et continua son service de facteur rural, il divorça en 1926 et mourut en 1930. En 1925 il reçut une pension pour ses 27 ans de service civil et ses 4 ans de service armée
Nolin Lucien paya ses 50 francs d’amende sans semble-t-il avoir fait appel de la décision, il fit une belle guerre et alla vivre dans l’Aisne.
Fauvet Alfred lui fut confirmé dans sa condamnation de 100 francs par la cours d’appel de Paris.
Quand à maman Lucie elle revint à Sablonnières et vendit son commerce.
Tout compte fait la seule véritable victime de cette sombre affaire de mœurs fut Suzanne.
Les autres souffrirent un peu en leur réputation mais l’arrivée d’autres malheurs bien plus grands fit que finalement la vérité fut enfouie dans les secrets de famille.
