
A quoi bon insister, il n’a pas besoin d’eux.
A Passant Louise la mère d’Albertine est bien contente que sa fille ait trouvé chaussure à son pied. Elle ignore ou feint d’ignorer les frasques et la légèreté de cette dernière. Au moins elle sera casée et quelques volées de son mari la feront rentrer dans le rang.
Le mariage est donc organisé, on reste sobre. Mais Albertine fait des manières et veut comme une nuit de noces. Alfred veut bien et considère que comme c’est la première fois qu’ils font cela dans les draps il doit y mettre un brin de solennité. Il faut bien le dire Albertine à quelques talents dans cette spécialité.
Les deux s’entendent à merveille, le bruit de la sensualité et de l’extase parcours la petite maison où ils se sont installés. Rien de bien extraordinaire mais suffisamment grand et confortable pour accueillir le petit, vers le mois d’octobre.
Alfred va être père, il a une femme, un toit et le travail ne manque pas. Certes il aimerait bien que son frère le reçoive le dimanche pour une volaille ou un rôti et que Blanche ne change pas de coté lorsqu’elle le croise.
Il n’y a qu’Eugénie la petite qui en sortant de l’école va chez son oncle. Elle a treize ans mais a le raisonnement d’une femme de trente. Alfred est à l’aise avec elle et il discute librement. Gentiment, elle lui dévoile se qu’on raconte sur Albertine. Les hommes de la tuilerie disent que seul le curé ne lui est pas passé dessus, chez Legouge le marchand de vin on raconte aussi que pour presque rien on peut l’avoir. Alfred reste de marbre, des ragots il y en a dans tous les villages . Albertine est une bonne femme et sera une bonne mère.
Un jour Blanche s’arrête tout de même, la femme d’Alfred n’est pas là et c’est tant mieux. Elle engage la conversation et tranquillement lui dit .
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Dis donc quand est ce que la délivrance est prévue
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Vers octobre
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t’es sûr Alfred
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bah oui pourquoi
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Je trouve qu’elle est bien grosse
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tu crois
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Elle a les mamelles qui lui tombent sur le ventre.
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Tu dois mal voir, moi je les vois tous les jours.
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Et puis son ventre, elle a besoin d’une brouette pour le charrier.
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C’est des conneries fous moi la paix Blanche.
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Comme tu voudras
Alfred est un peu ébranlé car effectivement sa femme a bien grossi. Il n’y connaît pas grand chose en femme mais c’est vrai qu’elle porte bien vu le temps qui lui reste à porter.
Puis hier pour la première fois elle s’est refusée, cela lui a paru étrange mais Albertine lui a expliqué qu’avec un bébé on ne fait pas ce qu’on veux.
Cette dernière du haut de ses dix neuf ans est sublime en déesse de la fécondité, son teint de femme enceinte se marie avec celui de rousse en une teinte d’impressionniste. Ses seins ronds comme des pastèques pleines tentent de sortir à tout moment de son corsage, ils veulent s’échapper pour le bonheur des yeux concupiscents des hommes attablés.
Sa taille n’a finalement que peu forci tant elle était mince au départ. Mais l’œil averti des matrones ne se trompe guère et l’on présent dans le village que la catin au Gautier va vêler incessamment.
Le soir Alfred prit de boisson se fâche et veut son dû, il s’en moque de cette grossesse.
Albertine tente de résister mais elle sait en femme à homme qu’il ne faut pas refuser tout le temps. Son corsage à terre, les seins murs de parturiente s’offrent au regard dans leur énormité éléphantesque. Alfred en reste bouche bée, subjugué, on s’y noierait, on s’y engloutirait. Comme hypnotisé par la pythie de Delphes il ne fait guère attention au ventre près à se vider et besogne de toute son amour une Albertine échevelée, fatiguée et ennuyée par cette effusion grandiose.
Pendant que le couillon s’endort, elle pose ses mains sur son ventre et sent la vie qui s’anime en son sein. Pour un peu elle en serait heureuse, mais elle sait que l’être qui est en elle va être une source de problèmes, elle le présent comme une devineresse l’avenir.
Deux jours plus tard , l’affaire se déclencha, des douleurs lancinantes, une fatigue extrême, Albertine doit faire demi tour sur le chemin de la ferme de l’île où elle allait travailler. Elle ne sait quoi faire, mais une femme dont elle ne connaît pas le nom présume bien de la situation et l’aide à rentrer chez elle.
On va chercher Blanche qui malgré sa haine vient au secours de sa belle sœur.
Sitôt franchi le seuil de sa maison elle a perdu les eaux, il faut faire vite. La sage femme est au champs il faut vite la ramener.
La douleur est grandissante, les contractions se rapprochent, Albertine qui de sa vie n’a jamais ressenti la douleur passe de l’ignorance à l’extrême. Elle hurle, se tord , sa chemise est trempée. L’accoucheuse arrive, prend les choses en main, la fait presque asseoir, lui écarte les jambes et sans aménité mesure l’ouverture du col. Il y a aussi Hortense Thierry la voisine elle a 43 ans et a déjà eu 4 enfants, elle sait de quoi elle parle. Puis il y a Marie Louise Gatelier une autre des voisines qui pénètre à l’intérieur de la pièce. La réputation d’Albertine n’a beau pas être bonne, une femme n’abandonne pas une autre femme dans ces moments là. C’est une solidarité du fond des ages et puis Albertine est encore bien jeune, alors on serait enclin à lui pardonner.
De son ventre étroit de gamine apparaît maintenant des cheveux, on l’écartèle, on la fouaille, on l’empale, le supplice cessera t ‘il. Enfin comme une crue qui brise les digues, comme une marée d »équinoxe qui emporte, un sale paquet lui tombe entre les cuisses. Il lui semble qu’elle n’a plus de ventre. Elle s’effondre et des larmes lui viennent. Blanche coupe le cordon et lui dépose sur le ventre semblant lui dire tient voilà le bébé de la honte, le monstre, l’animal de cirque que tu viens d’imposer à ton mari.
La tension redescend, on fait toilette au petit, on change les draps souillés, finalement tout c’est bien passé, le petit était bien placé et ses hanches de bourgeoise pouvait donc enfanter.