UNE ANNÉE DE LA VIE D’UNE FEMME, SEMAINE 36, une absence inquiétante

 

Alors là, j »étais un peu inquiète, quelque chose me taraudait sans que je puisse réellement savoir quoi. Nous étions dimanche, la messe était dite et je me promenais dans le village comme les autres femmes. On discutait de tout et de rien, des enfants, des récoltes, des maris et des futurs mariages. Bientôt nous fumes à proximité du menhir du camps de César. Moi cette pierre immense debout dressée me fascinait, Stanislas disait qu’elle faisait plus de huit mètres de haut. C’était bien possible, sur la commune il y avait des pierres semblables mais elles étaient bien plus petites. D’autre part à proximité de ce géant existaient deux autres pierres mais plus petites, cela formait comme un triangle. Je m’en souvenais bien car lorsque j’étais petite on allait y jouer, le propriétaire en avait fait détruire deux. Que ne disait-on pas sur ce gros caillou, les hommes parlaient crûment et s’imaginaient que cela faisait rêver les femmes, toujours dans l’exagération ces bons hommes.

Certains érudits comme le curé expliquaient que c’était des hommes qui avaient élevé ces pierres, peut-être un culte d’avant l’arrivée du notre. Après on parlait de César, peu savait qui était ce César, moi en particulier. Louise qui était plus intelligente que nous croyait savoir que c’était un empereur romain qui avait conquis la Gaule et qu’il avait installé son campement autour des pierres. Apparemment c’était bien loin donc bien invérifiable. Mais circulait une autre version, un géant dénommé Gargantua s’en serait servi comme minche pour jouer au palet. Donc on en savait rien et je m’en moquais c’était un lieu de promenade pas très loin de l’église. On pouvait tourner autour de long moment. D’ailleurs j’étais plus tranquille autour de celui là que près des pierres de la Cornetière ou du bois Bougon dont je vous reparlerai.

Puis on en vint à évoquer nos problèmes de femmes, nous avions toutes sensiblement le même age et surtout les mêmes problèmes. Marie Jeanne vint à évoquer les menstrues qu’elle avait eu du matin. Nom de Dieu excusez moi l’expression je restais figée et mes compagnes crurent voir un fantôme devant elles. Voila ce qui me turlupinait, mes règles je ne les avais plus, c’était cela, oui quelle cruche je faisais. J’en eus une sueur froide. Puis je me ressaisis, un léger retard sans doute.

Nous voir tourner autour de cette pierre pouvait donner l’image d’un immense chapelet dont nous eussions étés les grains et qu’une main géante égrenait. Pendant que nous causions nos bonhommes refaisaient le monde à l’auberge. Nous étions somme tous assez heureux, surtout lorsque les contingences matérielles n’entraient plus en considération.

Mais les litanies de Marie Jeanne et les jérémiades de Louise ne m’égaillèrent qu’un temps, ma préoccupation revenait et revenait encore.

Si le fait de me retrouver enceinte était un non événement car à notre age il était évident que nous étions fertiles par contre ne pas savoir de qui était l’enfant posait un plus grave dilemme.

De toutes façons j’étais coincée, qu’il soit de Stanislas ou d’Aimé il serait de Stanislas. Je me voyais mal annoncer à mon mari, ton enfant est celui du jeune valet et je ne me voyais pas annoncer au domestique âgé de 17 ans que j’avais un enfant de lui.

Mais bon pourquoi me tourmenter maintenant, c’était un léger retard et rien d’autre.

Ces maternités était un problème récurent pour nous autres, ils n’y avaient pas des milliers de solutions.

L’abstinence en était une et la plus efficace, c’est pour cela que nous retardions nos mariages. Seulement voilà, il fallait pouvoir résister à la tentation ce qui n’était pas facile pour nos jeunes corps. Ensuite pendant l’acte nos bonhommes devaient se retirer, vous parlez d’un pratique, Stanislas en était incapable mais bon. Il y avait ensuite toutes les pratiques condamnables, chacune en parlait sans que je sois bien sûr qu’elles le pratiquent réellement. Louise pour ne parler que d’elle car c’était la plus délurée avait soit disant tout essayé. Pour ma part je ne me résoudrais jamais à quoi que ce soit d’interdit par la morale et par l’église. A une restriction près, car le curé ne préconisait l’acte que pour la reproduction, il ne fallait quand même pas exagérer.

La journée finissant nous les femmes nous rentrâmes en nos foyers, les hommes traîneraient encore un peu, les pauvres ils reprendraient leur dur travail dès le lendemain. C’est vrai que nous les femelles on ne faisait rien.

Au loin je crus apercevoir Céleste prendre la direction opposée au château, ce n’était qu’une vision fugace j’avais peut-être cru la voir. Par contre sans me tromper je pus dire que mon dégingandé de mari lui avait bien pris le même chemin.

Impulsivement je me décidais à les suivre.

Ce ne fut guère facile car Stanislas allait vers le moulin Boisseau. On ne se posa guère de question sur lui, mais moi que faisais- je là sur ce chemin. Tout le monde me connaissait et savait bien que j’étais la Herbert de la Gaborinière et quand cette soirée finissante il y avait comme une indécence à ce que je m’éloigne seule de chez moi.

Je fis comme ci de rien n’était mais finalement je n’eus pas à aller bien loin, les deux fautifs prirent le petit chemin qui longe le ruisseau vers Beauchêne. Je pris la décision de m’enfoncer moi aussi dans les épais halliers.

La vision qui s’offrit à moi fut loin de me plaire.

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