LE TRÉSOR DES VENDÉENS, Épisode 17, Les orphelins

1838, La Vilnière du Martinet, Beaulieu sous la Roche

Jean Aimé Proux

Pour moi beaucoup de choses étaient  changées, après le départ de mon père, ma cellule familiale en fut bouleversée, mais je n’avais pas changé d’endroit et je gardais les repaires que j’avais toujours eus

Le premier changement fut le mariage de Jean Pierre mon oncle avec une fille de la commune de Vairé, c’en était fait car il préféra quitter la métairie. Il préférait semble t ‘il voler de ses propres ailes et devenir métayer sans son père et son frère. Il se retrouva journalier à la Chapelle Achard et le resta, il avait pu pouvoir, mais il ne put.

Toutefois au niveau du travail sa présence manquait, d’autant que mon grand père commençait à baisser de rythme.

Marie Jeanne se maria aussi avec Narcisse Joubert, cette union me marqua autant que le décès de mes parents, j’étais jaloux, ma tante m’abandonnait et se livrait à cet inconnu.

Tous les soirs quand ce jeune couple se réfugiait dans son alcôve, j’étais pris d’une fureur, ce voleur d’amour que lui faisait il que je ne puisse faire ?

Puis cela se calma, Narcisse était gentil, il n’avait somme toute que quinze ans de plus que moi et il devint comme un grand frère. Ma tante me rassura elle ne m’abandonnerait pas, ni moi ni mes sœurs.

Il faut quand même avouer que lorsque j’étais seul dans mon lit c’était bien à ma tante que je rêvais, elle était toujours présente et mes premières érections furent pour elle. Les errements érotiques  qui occasionnèrent  mes première pollutions sont dus aux songes qui me la faisait apparaitre nue à mes cotés.Lorsque je pris  l’habitude des gestes d’Onan tout ces moments d’extase lui furent dédiés

En 1836 ce fut l’éclatement, mon oncle Jean devint journalier à son tour.

Narcisse Joubert devint métayer sur la commune du Martinet, à la Vilnière, les grands parents les suivirent et comme promis Marie Jeanne et son mari nous emmenèrent nous, les quatre orphelins Proux.

Bien sur j’étais heureux de partir avec eux mais j’étais rempli de tristesse à quitter les terres de mon enfance.

Je vis aussi mon vieux aïeul pleurer lorsqu’il ferma une dernière fois la barrière de la Poissolière.

Avec mon frère nous étions des adultes maintenant, enfin pour le travail quatorze et seize ans vous pensez, nous étions de vrais paysans expérimentés.

Le grand père n’avait pas résisté à son départ de la Poissolière, mort l’année suivante, de tristesse disait mon frère. Puis ce fut le départ de ma grand mère et bizarrement je ne sus son age que le jour de sa mort, pour moi elle était vieille un point c’est tout, mais tante Jeanne me dit, tu sais elle n’avait que cinquante huit ans. J’en fus sidéré, Narcisse en rajouta,  » ouais je crois qu’elle pouvait servir encore à un homme  » la tante fut horrifiée et il en rajouta,  » en plus c’est pratique elles peuvent plus avoir d’enfants  »

Autant vous dire que ce soir là Narcisse il ne put faire d’enfant à la Marie Jeanne .

Il fut convenu que nous resterions chez les Joubert jusqu’à ce que leurs enfants puissent travailler comme des adultes, ensuite nous partirions vivre notre vie.

Je ne savais pas que j’y resterais plus longtemps à mon grand bonheur.

La métairie appartenait aux Mercier de L’épinay une famille de noble de Beaulieu sous la Roche et de la Chapelle Achard.

Ils demeuraient au château de la Guissière à Beaulieu et au Plessis Gatineau à la Chapelle Achard.

Les paysans les respectaient fort car ils avaient eu à souffrir comme eux des malheurs de la révolution, ils étaient fort riches et très influents sur la vie politique de notre canton.

La maison était spacieuse, plus jolie et fonctionnelle que la Poissolière, j’avais un lit que je partageais avec mon frère et le lit de mes petits cousins se trouvait dans la même pièce que le notre. Mes sœurs dormaient dans la même pièce que ma tante et mon oncle Joubert.

Nous fîmes le tour de nos terres, je m’identifiais à cette propriété et je devenais Jean Aimé Proux de la Vilnière, joli nom en vérité pour moi qui n’avais rien en propre que ma chemise rapiécée.

Le verger était splendide, des arbres magnifiques vieux et bien taillés sous lesquels s’ébattaient une multitude de gallinacés, nous ferions sûrement un bon cidre et de la bonne eau de vie.

Nouveauté pour nous, une belle vigne que je devrais apprendre à entretenir, les noms des pièces me rendaient bucolique et joyeux, pièce des choux, champs des pommiers rouges, la petite fillée, la grande fillée, le petit mart et le grand Essart.

Nous étions comme des fous, prenant à pleines mains une poignée de terre sur chaque parcelle, nous la sentions et l’égrainions dans nos doigts.

Pour la vigne, Narcisse et nous même, étions des débutants, bon il fallait pas s’emballer nous n’en avions pas non plus beaucoup des pieds et nous ne ferions pas de nombreuses barriques.  Le vin d’ailleurs comme tout le reste devait être partagé avec la dame du château, mais je faisais confiance au Narcisse pour resquiller notre consommation personnelle.

Moi je n’aimais guère ce breuvage un peu âpre et je le coupais avec de l’eau, mon frère qui faisait le fiérot du haut de ses seize ans me disait avec ta flotte tu gâches ce divin Noah. Pour ce qui est de la divinité j’en savais rien mais certains en prenaient de sacrée cuvée, car le bougre était traitre.

Toutes ces années, la famille Proux dont je faisais parti se conjugua à la famille Joubert, nous n’étions qu’une et même famille, on peut dire que j’étais heureux. Narcisse cet oncle à moitié frère, Marie Jeanne à la fois tante, mère et idole de mes rêves, tout me faisait oublier que j’étais orphelin et je leurs en étais reconnaissant.

Au sujet de ma tante, je la regardais de moins en moins comme une femme, il faut dire que son énième grossesse avait un peu amoindri son capital charme. Marie Jeanne devenait une forte paysanne aux hanches larges et à la poitrine tombante.

Je cherchais maintenant dans les sourires et les silhouettes des petites paysannes que je croisais dans mes songes pour mes nuits de célibataire.

Je savais par expérience et observation que nous autres on ne se mariait pas avant vingt cinq ans bien tassés j’avais donc le temps. Mais à mon age on est impatient.

Notre petite commune du Martinet est rattachée à la commune de Beaulieu sous la roche, ça fait loin pour aller à la mairie, d’autant que les chemins ne sont guère praticables.

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